«L’ensemble de l’action entreprise par le Conseil ces dix dernières années témoigne de son ralliement à une approche plus opérationnelle, Plus pragmatique, de ses fonctions. Élargissant sa vision traditionnelle du maintien de la paix, il n’a pas hésité à autoriser les États Membres, sur la base du Chapitre VII, à recourir à la force armée dans le cadre de conflits internes, soit pour rétablir un pouvoir démocratiquement élu, soit pour assurer la sécurité des opérations de secours humanitaires , et à invoquer ce même chapitre pour instituer les Tribunaux pénaux pour l’ex- Yougoslavie et le Rwanda . Il a brouillé la distinction entre « opérations de maintien de la paix » non coercitives et opérations militaires coercitives de l’Article 42 en invoquant le Chapitre VII pour la création des premières et pour les autoriser à user de la force armée. »

Hervé CASSAN ‘’L’avenir du CSNU : une question de méthode’’

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Introduction

D’après Serges Sur, « les autorisations du recours à la force pour raisons humanitaires (répression sanglante, guerre civile..) étaient soit limités dans le temps (2 mois pour la résolution 929 concernant le Rwanda) soit à des activités précises (protection des convois humanitaire en Bosnie dans le cadre de la résolution 770) ». L’adoption de la résolution soumise à commentaire inaugure une nouvelle étape dans la mise en œuvre dans la protection des civils.

De facto, c’est la première fois que le CSNU a donné un mandat général d’utilisation de la force pour protéger les civils.

En effet, la Libye, pays d’Afrique du Nord (bordée par l’Algérie, la Tunisie, le Niger et le Soudan) fut le théâtre d’une rébellion qui a dégénéré en guerre civile, opposant anti et pro-Kadhafi sur fond de querelles régionales, tribales et pétrolières. En février 2011, les exactions se multiplient et les victimes civiles collatérales s’amplifient. Dans cadre d’une médiatisation croissante des protestations dans les pays arabes et d’une mobilisation de l’ONU et de certains de ces états membres, la communauté internationale fait pression sur le régime libyen en place. Une première résolution n’impliquant par le recours à la force a été prise en vertu du chapitre VII (recours en cas de menace contre la paix) de la CDNU (1970 (26/02/2011). Elle prévoit la saisine de la CPI afin d’engager la responsabilité des responsables en place et impose des restrictions économiques et militaires (embargo, vigilance accrue, gel d’avoirs...). Cependant, la situation sur place ne s’améliore pas en corrélation avec l’objectif de défense des civils attendu. En conséquence, une coalition d’états (Français et Britanniques) fait pression pour une action manu militari rapide. Gérard Araud dépose la résolution 1973 qui fut adoptée dès le lendemain in extremis du fait de l’opposition (néanmoins sans vétos) des BRIC.

Les principaux points de la résolution soumise au vote jeudi par le Conseil de sécurité de l'ONU sur la Libye.
La résolution décide de renforcer le dispositif de coercition pacifique de la résolution 1973.
Mais l’apport de la résolution concerne l’établissement d’une zone d’exclusion aérienne et notamment l’autorisation pour les Etats membres de « prendre toutes les mesures nécessaire à la protection des civils ». En clair, la résolution présente une base juridique suffisante pour permettre l’intervention militaire sous forme d’intervention avec des tirs au sol (sans déploiement terrestre). Dès lors, il s’agit de se demander si la protection des civils et le non respect d’une résolution par l’état débiteur peut impliquer un recours à la force dans le cadre d’un conflit interne. A fortiori, la question sous jacente en DIP concerne la conformité à la résolution du CSNU des mesures qui se réclament être l’application de cet instrument. Cette résolution fait émerger des enjeux complexes. Quid du respect de la souveraineté et du principe de non ingérence. Le principe de l’interdiction du recours à la force est maillon essentiel du système de sécurité collective mis en place après la WWII. Transgressée à différentes reprises, la question de sa valeur se pose aujourd’hui.

En effet, le droit international doit-il, admettre d'autres cas d'autorisation de recours à la force armée dans les relations internationales ?

Car, il est aisé de constater une application extensive de la CDNU et la possible application glissante de la résolution 1793. Un mandat général d’emploi de la force peut contenir une marge de manœuvre militaire discrétionnaire à la faveur des états titulaires de ce dernier. Dans cette perspective, il sera fait état de la résolution 1973 (2011) : une résolution à double tranchant (I/) qui illustre la gamme de mesures graduée permettant une sortie de crise en DI. Cependant cette résolution assez contestée marque le juriste par ses apports dans les possibilités de recours à la force et laisse perplexe quand son application a posteriori et l’ambiguïté ambiante qui a entourée sa décision. En cela, il semble avenue de se demander si la résolution 1973 (2011) est une « erreur de frappe » ? Une résolution équivoque ? (II/)

I/ La résolution 1973 (2011) : une résolution à double tranchant

Afin de commenter le corpus de la résolution, il semble judicieux de relever le caractère « multi-options » de la résolution qui tout en évoquant le recours à une gradation des moyens d’action en réponse aux manquements des autorités libyennes (A/) fait intervenir l’autorisation d’un recours à la force en réponse aux violations massives du DI par les autorités libyennes (B/).

A/ Le recours à une gradation des moyens d’action en réponse aux manquements des autorités libyennes

La CDNU définit une gradation des moyens d’action à la disposition du Conseil. L’article 40 précise qu’avant de décider de mesures coercitives sur la base des articles 41 et 42, il « peut inviter les parties intéressées à se conformer aux mesures provisoires qu’il juge nécessaires ou souhaitables ». C’est tout l’objet de la résolution 1970 (2011).

L’article 41 l’autorise à décider de mesures coercitives n’impliquant pas l’utilisation de la force armée.

Le Conseil de sécurité se saisit alors de la situation en Libye et, se référant au chapitre VII de la Charte des Nations unies, adopte la résolution 1973 le 17 mars 2011.
Par exemple, l’article 13 de la résolution soumise à commentaire renforce l’embargo sur les armes.
Idem quand à l’interdiction des vols (article 18), la désignation (article 22) et le mandatement du groupe d’experts (article 24). En effet, le CSNU déplore « la détérioration de la situation, l’escalade de la violence et les lourdes pertes civiles ». En outre, il rappelle la responsabilité qu’il incombe aux autorités libyennes Il est clair, « qu’il apparait dans cette échelle progressive des actions un ordre que le Conseil doit tenter de respecter, au moins lorsque la situation qui lui est soumise ne constitue pas un acte d’agression ». Quand à l’article 42, il définit les mesures impliquant le recours à la force armée dans le cas où les mesures prévues à l’article 41 seraient inadéquates ou se seraient révélées telles. Enfin, si la Charte des Nations unies interdit aux États membres tout recours à la force (art. 2), son chapitre VII prévoit un mécanisme de sécurité collective permettant l'emploi de mesures coercitives en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d'actes d'agression.

B/ Le recours à la force autorisé en réponse aux violations massives du DI par les autorités libyennes

C'est sur ce fondement (voir transition supra.) que la résolution 1973 (2011) a été adoptée par le CSNU, alors que Mouammar Kadhafi avait annoncé un assaut contre la ville de Benghazi, fief des rebelles. Après avoir qualifié « la situation en Jamahiriya arabe libyenne » de menace pour la paix et la sécurité internationales, le CSNU a autorisé notamment les États membres, qui ont adressé au Secrétaire général une notification à cet effet et agissent à titre national ou dans le cadre d'organismes ou d'arrangements régionaux et en coopération avec le Secrétaire général, « à prendre toutes mesures nécessaires (...), pour protéger les populations et les zones civiles menacées d'attaque en Jamahiriya arabe libyenne, y compris Benghazi »

Il est d'usage de considérer les résolutions du Conseil de sécurité comme sources de droit.
Le CSNU assimiles les attaques généralisés et systématiques contre la population à des « crimes contre l’humanité.
C’est dans ce contexte qu'il devient possible de définir plus clairement la base matérielle d'une autorisation à intervenir: le critère serait celui d'une violation massive du droit international par un Etat agissant contre ses propres citoyens. Selon, H. CASSAN, « Un Etat qui commettrait de tels crimes contre sa propre population ne remplit plus la tâche fondamentale qui seule puisse le légitimer comme un ordre juridique contraignant. Il perd sa légitimité et ainsi sa souveraineté, y compris vers l'extérieur. Des exemples sont l'Allemagne nazie ou Rwanda sous le régime des Hutus. Ces Etats ne peuvent plus s'affirmer contre une intervention de la part d'autres Etats dont le but est d'accorder l'aide en urgence. De tels crimes représentent bien une menace à la sécurité internationale car ils sont une violation de la norme universelle qui légitime les Etats ». Paradoxalement, le CSNU réaffirme «son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de la Jamahiriya arabe libyenne ». Dès lors, il apparait la complexité de cette résolution qui mêle des concepts contrastés.
De facto la distinction entre « opérations de maintien de la paix » non coercitives et opérations militaires coercitives de l’article 42 en invoquant le Chapitre VII pour la création des premières et pour les autoriser à user de la force armée est brouillée.

II/ La résolution 1973 (2011) : une résolution équivoque ?

Malgré l’objectif vertueux et humanitaire certain de la résolution, une analyse critique de cette dernière est nécessaire. La réflexion, grille de lecture se situe au carrefour de la légalité, de la légitimité et de l’efficacité de la résolution. En effet, concernant la légalité et la légitimité, les questions de forme et de fond relèvent de l’application extensive faite de la CDNU (A/). Et enfin, l’efficacité de résolution peut être mise en doute de part l’application a fortiori glissante de la résolution (B/) dans les motifs qui l’ont suscité et l’application a posteriori par les états membres chargés de mener les opérations de protection humanitaire.

A/ L’application extensive de la CDNU (quelle légalité et légitimité pour la résolution ?)

Deux points seront présentement traités : d’une part la légalité de la résolution (condition de fond) et d’autre part la légitimité de la résolution (condition plus formelle relative à la problématique du droit de véto). L'article 4 de la Résolution 1973 autorise aux Etats qui auront notifié le Secrétaire général à "prendre toutes mesures nécessaires" pour protéger la population civile en Libye en se basant sur le chapitre VII de CDNU qui prévoit un mécanisme de sécurité collective permettant l'emploi de mesures coercitives en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d'actes d'agression. La doctrine s’est donc rapidement demandé si la situation en Libye constituait une menace contre la paix et entrée par la même occasion dans le champ d’action de la chartre. Dès lors, il peut mis en doute la question de la nécessaire proportionnalité.

L’exécution de la résolution par la coalition est en conformité avec le but de la résolution ?

Il advient que ces exceptions ne permettent pas en conséquence de remplir cette fonction si elles sont des autorisations illimitées de recours à la force; elles ne peuvent le faire que si elles sont définies avec exactitude afin d'empêcher la force illégale des tiers.

Le 17 mars 2011, le Conseil de sécurité de l'ONU a voté en faveur d'un recours à la force contre les troupes du colonel Mouammar Kadhafi, ouvrant la voie à des frappes aériennes en Libye.
Pourtant rien ne nous permet de dire qu’elle est apriori illégale.
Et, elle constitue en tout état de cause une nouveauté, qui a contrario ouvre un débat tout autre concernant le droit pour des populations civiles voisines à obtenir une telle aide (notamment la Syrie, le Yémen et le Barein). Selon Anne Hamonic, « Qualifiée par des commentateurs d'historique, cette résolution a été adoptée, à la duite d'une bataille diplomatique, avec dix voix pour, sur les quinze membres du CSNU, et cinq abstentions. La Chine et la Russie n'ont pas opposé leur veto, dont ils disposent en tant que membres permanents avec la France, le Royaume-Uni et les États-Unis. L'Allemagne, le Brésil et l'Inde se sont abstenus ». En effet, il peut encore une fois être contesté la représentation des Etats aux CSNU (voir dissertation). Néanmoins au regard de la situation actuelle de la Syrie, les commentateurs autant divergeant soient-il s’accordent à reconnaitre qu’ici, un consensus (même relatif) a permis de venir en aide à des populations civiles. De surcroit, le CSNU vient souligner le rôle croissant joué par des organisations régionales interétatiques (Organisation de la Conférence islamique, Ligue des Etats arabes, l’Union africaine). En l’espèce, c’est clairement le problème de l’efficacité qui soulève les nombreuses controverses. Intervient ici, la question sous-jacente concernant la conformité à la résolution du CSNU des mesures qui se réclament être l’application de cet instrument. En effet, cette résolution est le fruit de la volonté de certains états se réclament du DI. Et Les opérations militaires se déroulent alors sous la responsabilité et le pavillon des États participants. Le plus souvent, l’expression « recours à la force » n’est pas employée (par pudeur). C’est plutôt le vocable « tous les moyens nécessaires » qui est utilisé.

B/ L’application a fortiori glissante de la résolution (Quelle efficacité pour la résolution ?)

Force de contesté que la marge de manœuvre est laissée aux Etats ; le CSNU se défausse en quelque sorte de sa responsabilité. L’usage de la force est laissé à la discrétion des Etats.

Néanmoins, le mandat général d’utilisation de la force vise seulement un droit humanitaire, où la protection des populations civiles est l’objectif premier.

« Du coup se transforme aussi la problématique humanitaire : conçue à l'origine par Dunant comme l'assistance, sur les champs de bataille, à des soldats réguliers de puissances étatiques engagés dans des conflits officiels, la voilà maintenant engagée dans des luttes intestines et de longue durée, opposant souvent dans la plus grande confusion des États à une fraction de leur population ou des groupes rivaux dont l'identification, l'idéologie et les 6alliances ne sont pas aisément définissables ». La seule autorisation à des frappes aériennes marque le manque probable d’efficacité de cette résolution. D’ailleurs, il est apparu que la coalition franco-britannique a infiltré des agents en Libye et à largement participé au financement et à la coordination de troupes anti-Kadhafi. Ces mesures n’entrant pas dans le champ d’action permis par la résolution ; la légalité de l’application de la résolution peut être mise en doute. De surcroit, aujourd’hui, la crise interne au Mali (Nord/Sud) est en partie due à l’arrivée d’armes libyennes (armes données par la coalition) et à l’exil de mercenaires. En outre, « les troupes rebelles étaient prêtes à assurer la production de pétrole à partir des champs sous leur contrôle. Surtout : avec une éventuelle chute du régime du Kadhafi et la prise du pouvoir par le CNT, la France et Total verraient s’accroître considérablement leurs parts sur le marché pétrolier libyen » (N. Ameur ‘’Revue Outre-terre’)’. Et Ali Zeidane, porte-parole de la Ligue libyenne des droits de l'homme, déclara que le futur pouvoir « prendrait en considération les nations qui nous ont aidés ». Le constat est que le « domaine militaire reste plus sensible à la logique de puissance et au volontarisme politique qu’aux exigences de l’Etat de droit. Une réalité prégnante à laquelle n’échappent pas les démocraties » (S. SUR).

Il résulte que la résolution donne une sorte de « quasi- mandat » dont les aboutissants sont pour les Etats usant de la force souvent illimité.

P. Weckel a alors justement évoqué se possible « usage déraisonnable de la force » avec la remise au gout du jour de la résolution 1441 du CSNU par les USA. En l’espèce, une pratique ultra legem du CSNU justifierai une adaptation du Conseil et de la Chartre. En effet, au lieu d’apporter un fondement juridique controversé à des actions armés, le CSNU devrait coopérer afin d’étendre son pouvoir en précisant les limites ses habilitations.

A titre de conclusion, il peut être fait mention de la résolution 2016 (2011) du CSNU qui mis fin au général d’emploi de la force ( « en décidant que les dispositions des paragraphes 4 et 5 de la résolution 1973 (2011) deviendront caduques le 31 octobre 2011 à 23 h 59, heure libyenne »).

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Simon

Juriste et ancien élève de l'UPPA et de la Sorbonne, je mets à dispositions mes TD, notes et fiches de cours pour aider les étudiants. N'hésitez à poser vos questions en commentaire : On essaiera de vous aider en faisant de notre mieux !