Cette originalité résulte de la combinaison d'une série de facteurs qui nous empêchent de raisonner comme on le fait d'habitude.

La Cour finalement va les affirmer, les exprimer dans un arrêt très célèbre : CEDH, 1978, Irlande c/ Royaume-Uni :

  • requête : un État contre un autre État
  • objet : moyen de lutte contre le terrorisme utilisés par la Grande Bretagne en Irlande du Nord
  • accusation : torture
  • pourquoi ? Ce que les autorités irlandaises mettent en cause pour obtenir la condamnation de la Grande Bretagne c'est le traitement des prisonniers politiques appartenant à l'IRA
Ðretour au travail du juge = la Cour EDH est un acteur majeur dans l'œuvre de revalorisation du juge qui caractérise assez largement la fin du 20ème siècle
On met en cause les moyens d'interrogations càd la torture en blouse blanche.

La CEDH condamne le Royaume-Uni non pour torture mais pour traitements inhumains.

→ A cette occasion, la Cour emploie une formule :

« à la différence des traités internationaux de types classiques, la Convention déborde le cadre de la simple réciprocité entre États. En sus, d'engagements synallagmatiques, elle créée des obligations objectives qui bénéficient d'une garantie collective ».

Cette formule est absolument déterminante parce que la Cour pose là 2 grandes caractéristiques:

  • son caractère objectif
  • l'écartement de son application réciproque
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Récapitulatif des caractéristiques générales

Les caractéristiques générales du droit de la Convention EDH ne sont pas seulement le descriptif d'un système étranger qui viendrait se plaquer + ou – efficacement sur les systèmes de droit interne.

La logique avec laquelle la Convention EDH a déstabilisé bon nombre des constructions juridiques nationales est double :

  • on écarte les constructions nationales pour essayer de trouver une façon commune d'appréhender les choses ce qui amène à mettre de côté les techniques pour se préoccuper du fond. La Convention EDH est caractérisée par la volonté d'être concrète, pragmatique
  • la Convention EDH va revaloriser, ramener au 1er plan le juge. Cela va avoir des effets sur la pratique juridictionnelle: les juridictions vont se redécouvrir des ailes. On redécouvre les 2 plateaux de la balance:
    • celui de l'intérêt individuel, des droits de la personne
    • celui des intérêts de la collectivité, de la personne publique, de l'Etat

Quand on fait du droit européen, c'est du droit interne que l'on fait.

→ Idem pour la libre circulation des marchandises, des travailleurs, du droit de la concurrence, c'est du droit de l'UE.

Aujourd'hui, il est impossible de parler du droit au recours effectif sans parler de l'art. 13 de la Convention EDH.

  • 1 → mieux vaut parler du droit de la Convention EDH que de parler de la Convention et des art. qu'elle contient. C'est un ensemble normatif et jurisprudentiel.
  • 2: il a vocation à traiter de l'originalité du droit de la Convention EDH.

La Convention EDH n'est pas une convention comme les autres, en particulier parce qu'elle se détache des grands principes qui ordinairement conditionnent l'application du droit international.

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Des obligations objectives

Cette formule est absolument déterminante parce que la Cour pose là 2 grandes caractéristiques:

  • son caractère objectif (1)
  • l'écartement de son application réciproque (2)

→ Son caractère objectif (1): il est quelque chose de tout à fait essentiel pour 2 raisons:

  • il va donner une signification particulière à la Convention: la CEDH ne constitue pas un contrat passé entre États càd qu'il ne s'agit pas de droits et d'obligations mutuels qui auraient été acceptés par les parties et qui seraient donc pour leur bonne application, suspendus au respect mutuel de ces obligations.

Il s'agit de comprendre qu'il existe un patrimoine commun (= les droits de l'Homme) confié à l'ensemble des États qui doivent en garantir le respect.

→ fin de la cécité des tribunaux nationaux grâce à la CEDH: lorsqu'un droit est garantit, il est possible d'y porter atteinte mais à la condition d'avoir à la fois un motif légal et une intervention proportionnée.
→ Cela va entrainer que tous doivent être intéressés à la défense de ce patrimoine.

→ Cela va entrainer procéduralement, l'existence d'un recours inter-étatique qui est d'une originalité totale en droit international et qui s'explique par le caractère objectif de la Convention d'une part et par la « garantie collective » qui accompagne cette Convention d'autre part.

Autrement dit, à l'inverse des mécanismes du droit international général, les États, dans le système de la Convention EDH vont pouvoir intervenir en saisissant la Cour en violation des droits fondamentaux dans un autre État-membre et ceci, indépendamment de tout lien entre la victime et lui.

Ce ne sont pas ses propres droits que l’État va défendre, ce sont les droits de tout le monde, le patrimoine commun. Dans ce cadre là, il n'est pas besoin, pour l'Etat qui va agir, de faire la preuve d'un intérêt à agir.

Au regard du droit international général, cela pose un léger problème du droit de non ingérence sur lequel repose un énorme pan du droit international général.

Ceci ne s'explique que par le caractère objectif des droits qui sont contenus.

Le recours inter-étatique va très mal fonctionner.

Il va y en avoir très peu car les États ont le sentiment qu'en titillant le voisin, le voisin les titillera à leur tour.

Donc le recours inter-étatique ne fonctionne que pour les choses graves (torture par exemple) mais pas parce qu'un État ne respecte pas les droits de la défense.

On reconnaît comme étant licite le fait pour un État d'aller s'intéresser dans un autre État à l'état des droits et libertés fondamentales

  • il va entrainer un certain nombre de conséquences quant à l'autorité de cette Convention: en terme de hiérarchie, la Cour EDH de manière totalement prétorienne va expliquer que ce Traité n'est pas comme les autres et que pour cette raison, il prime sur les autres.

Le droit international ne connait pas de hiérarchie quant aux Traités en temps normal; tous les Traités ont une valeur égale.

→ Arrêt très connu: CEDH, 1990, Soering: un allemand détenu en GB est en passe d'être extradé vers les E-U car il a massacré sa belle-famille. Lié par une convention d'extradition à la GB, les E-U réclame son extradition. Dans l'Etat de Virginie, il encourt la peine capitale. Soering saisit donc la CEDH et elle déclare que la Convention est applicable parce qu'un État ne peut pas collaborer à une mesure qui pourrait même dans un État-tiers aboutir à une violation de la Convention.

Ce n'est donc pas la peine capitale le problème c'est le fait que la CEDH considère que la situation d'angoisse et d'humiliation dans laquelle risque d'être plongé Soering est constitutive d'un traitement inhumain interdit à l'art. 3 de la Convention EDH.

La hiérarchie particulière de la Convention

La Convention EDH ne peut à priori pas lier les E-U. Mais à côté de cela, on a un accord bilatéral E-U/GB qui prévoit l'extradition des criminels. Si la GB n'extrade pas, elle engage sa responsabilité internationale.

→ Problème juridique assez particulier.

La CEDH écarte d'un revers de main la difficulté et déclare que la Convention n'est pas un Traité comme les autres.

Il présente un caractère objectif et donc il est > aux autres. La Convention écarte donc le Traité bilatéral. La GB a interdiction d'extrader Soering.

C'est un engagement conventionnel d'une nature particulière, qui ne ressemble pas aux autres.

Bon nombre de conséquences découlent de son caractère objectif.

On constate l'amoindrissement très important des mécanismes qui habituellement en droit international permettent de relativiser l'autorité de ces règles internationales : il y a principalement 2 mécanismes qui permettent de relativiser la force obligatoire des conventions internationales:

  • fragmenter le consentement notamment en déposant des réserves ou des déclarations interprétatives (définition donnée par la Convention de Vienne): la Convention EDH a pour but de proclamer et de garantir des droits fondamentaux donc est-ce vraiment compatibles de pouvoir déposer des réserves sur leur application? Dans un autre sens, si on interdit à un État de déposer une réserve, il ne signera pas.

Donc question particulièrement sensible. C'est une possibilité de favoriser l'adhésion d'un État à un Traité.

C'est la raison pour laquelle on a assisté à une démarche très progressive.

D'abord réserves acceptées et tolérées comme un moindre mal car sans ces réserves là, adhésion impossible.

Quand la réserve est compatible pas de problème mais lorsque la réserve n'est pas compatible avec l'économie générale de la Convention et que les Etats ont eu la faiblesse de laisser s'engager les procédures de ratification, problème.

C'est au moment où l'Etat va vouloir utiliser sa réserve (càd devant la Cour), que la CEDH va être confrontée au problème du contrôle de la validité des réserves.

→  Si l'Etat l'avait su au départ, il n'aurait peut être pas signé la Convention.

C'est un facteur de crise majeur !

  • mise à l'écart de la règle de la réciprocité (2): début des 1960's, il est hors de question que la règle de réciprocité s'applique en matière de droits de l'Homme. La Cour de Justice va développer exactement le même raisonnement en faisant valoir que lorsqu'on est lié par un engagement humanitaire, la réciprocité ne s'applique plus.

Par nature, les engagements internationaux touchant aux droits de l'Homme ont vocation à constituer une dérogation au principe.

Sur ces 2 terrains, la Convention EDH présente des singularités

  • l'applicabilité directe de la Convention EDH (3) est également une des conséquences de ce caractère objectif et de cette spécificité du droit de la Convention.

En aucun cas, il ne faut attendre que ces droits là soient introduits dans le droit interne un par un pour trouver leur effectivité.

Dès lors que la procédure d'incorporation de la Convention dans l'ordre interne s'est opérée, il n'y a pas besoin de caractère réglementaire pour donner vie à la mesure.

Cela est d'autant plus vrai que 2 éléments confirment cette situation juridique :

  • la CEDH se borne à reconnaître un patrimoine existence donc les droits sont déjà partie intégrante du droit interne: on proclame, on ne créé pas
  • c'est précisément l'office du juge interne que de garantir l'exercice de ces droits puisque sur le plan procédural règle de l'épuisement des voies de recours interne

 

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Simon

Juriste et ancien élève de l'UPPA et de la Sorbonne, je mets à dispositions mes TD, notes et fiches de cours pour aider les étudiants. N'hésitez à poser vos questions en commentaire : On essaiera de vous aider en faisant de notre mieux !