« Le gouvernement a voulu rénover le régime parlementaire. Je serai même tenter de dire qu’il veut l’établir, car pour de nombreuses raisons la République n’a jamais réussi à l’instaurer » Michel Debré (discours devant le Conseil d’Etat, 27 aout 1958).

La volonté de Michel Debré est de donner à la France un régime parlementaire rationalisé. En effet, il veut mettre fin à la « dictature des assemblées ». La Constitution de 1958 s’est voulu une correction de l’instabilité des Républiques précédentes. Ce rationalisme parlementaire a été soutenu par un exécutif où le Chef de l’Etat s’appui sur un Premier ministre dans ses choix de la politique nationale. Il en découle une certaine mixité du régime. Mais celle-ci c’est vite traduite par la naissance d’un présidentialisme du à des révisions constitutionnelles clés (1962 et 2002) et une personnalisation et une prééminence du pouvoir Présidentiel.

Dans quelle mesure peut-on parler d'une présidentialisation de la fonction de président ?
Laquelle fait concentrer le pouvoir entre les mains du Chef de l’Etat.
Pour définir la typologie d’un régime politique, on s’appuie sur la structure de ses pouvoirs. Un régime parlementaire est caractérisé par une séparation souple des pouvoirs, c'est-à-dire une collaboration entre le pouvoir exécutif et législatif. Ils disposent par définition de moyens d’action réciproques (droit de dissolution et renversement du gouvernement). A l’inverse, un régime présidentiel est défini par une séparation stricte des pouvoirs, c'est-à-dire un système très cloisonné entre pouvoir exécutif et législatif.

Dans un régime présidentiel, l'exécutif n'est pas responsable devant le corps législatif, contrairement au régime parlementaire.

De ce principe il découle que le gouvernement ne peut être renversé par le parlement. Inversement le pouvoir exécutif ne peut dissoudre le parlement. Le basculement de la Vème République vers un régime présidentialiste, apparait notamment en 1962 avec l’élection du président de la République au suffrage universel direct. Cette présidentialisation est progressive et elle dépend de la personnalité du Chef de l’Etat.

Existe-t-il une séparation souple des pouvoirs en France ?
Récemment la réforme de modernisation des institutions de 2008 a marqué un pas de plus vers le régime présidentiel.
Le questionnement sur la nature de notre régime et la cohérence constitutionnelle du fonctionnement des institutions de la Vème République permet de comprendre que la pratique présidentielle diverge parfois de son rôle originel. On assiste depuis un demi-siècle à un bouleversement de la fonction présidentielle et à l’enclenchement irrévocable de révisions constitutionnelles clés. La séparation souple des pouvoirs est alors clairement remise en cause. Il s’agit alors se demander si le régime de la Vème République va basculer en un régime présidentialiste. Dans cette perspective, nous traiterons tout d’abord de la Vème République : un régime parlementaire rationalisé (I/) puis au vue des mutations institutionnelles nous nous questionnerons sur le basculement du régime parlementaire au régime présidentialiste (II/).

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I La Vème République : un régime parlementaire rationalisé

Les institutions présentaient, à l’origine, les caractéristiques d’un véritable régime parlementaire conforme à la tradition républicaine française, sous réserve de certaines innovations tendant à « rationaliser » le parlementarisme.

Il s’instaure alors une séparation souple des pouvoirs : des moyens d’action réciproques (A/). Mais cette séparation complexe s’effectue au niveau interne de chaque pouvoir, en se basant sur les critères théoriques du parlementarisme : la structure des pouvoir (B/).

A/ Une séparation souple des pouvoirs : des moyens d’action réciproques

1/ Le droit de dissolution

Les rédacteurs de la Constitution de 1958 sont bien décidés à changer l’équilibre des pouvoirs. Ils rationalisent donc le droit de dissolution pour le rendre effectif. Ils pensent également à des contrepoids afin que l’exécutif n’abuse pas de son droit. En effet, le régime parlementaire se transformerait en un régime autoritaire si une dissolution pouvait être trop facilement acquise. Le droit de dissolution est déterminé par l'article 12 de la Constitution :

« Le Président de la République peut, après consultation du Premier ministre et des Présidents des assemblées, prononcer la dissolution de l'Assemblée nationale ».

La Vème République restaure pleinement le droit de dissolution qui devient une prérogative personnelle du chef de l'Etat, un pouvoir propre qu'il exerce sans contreseing. Cette prérogative du chef de l’état lui permet d’exercer sa fonction d’arbitre en cas de crise. Ce droit dont il dispose est propre au régime parlementaire. Il constitue un des moyens de pression dont l’exécutif dispose sur le pouvoir législatif. En contrepartie, ce dernier peut renverser le gouvernement par le biais de la motion de censure.

2/ La motion de censure

La motion de censure constitue le symbole de la fonction de contrôle exercée par la chambre basse du Parlement : cette dernière a théoriquement droit de vie ou de mort sur un gouvernement. Sous la IIIème et la IVème Républiques, cette fonction de sanction s’exerçait pleinement dans la mesure où les députés n’hésitaient pas à renverser le gouvernement, même si cela résultait davantage d’une initiative prise par celui-ci (question de confiance) que d’un acte engagé par les parlementaires eux-mêmes (motion de censure).

Quelles limites au pouvoir léglisatif ?
La motion de censure : une arme fatale ?
Le parlementarisme rationalisé de la Vème République a rompu avec cette pratique pour inaugurer une "symbolique de l’arme absolue" (Yves Mény). La Constitution de 1958 a prévu deux types de motion de censure : la motion de censure spontanée ou offensive (article 49 alinéa 2) et la motion de censure provoquée (article 49 alinéa 3). La première résulte de la seule initiative des députés. Afin de bien la distinguer des interpellations des Républiques précédentes, qui résultaient d’un seul parlementaire, elle doit être le fruit d’une volonté collective. Son dépôt nécessite ainsi la signature du dixième des membres de l’Assemblée nationale, soit 58 députés aujourd’hui. La motion de censure provoquée s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 3 de l’article 49. Elle résulte à l’origine de la décision du gouvernement d’engager sa responsabilité sur tout ou partie d’un texte au cours de la discussion législative

B/ Les critères théoriques du parlementarisme : la structure des pouvoirs

La séparation des pouvoirs dans le cadre du régime parlementaire introduit un dualisme interne au sein même des pouvoirs. Un partage des pouvoirs est effectué entre le Président de la République et le premier ministre. De même, pour éviter l’hégémonie d’une assemblée, un partage des compétences est instauré entre le sénat et l’assemblée nationale.

1/ le bicéphalisme du pouvoir exécutif

La Constitution de 1958 réaffirme le principe du dualisme gouvernemental en vigueur sous les Républiques précédentes. toutefois, son originalité est de rééquilibrer le rapport entre les deux têtes de l’exécutif que sont le chef de l’Etat et le Premier ministre.

Quelles sont les prérogative du premier ministre ?
Un pouvoir à deux têtes ?
Les constituants veulent établir un certain équilibre, en effet avant 1958, le Président du Conseil était le véritable titulaire du pouvoir exécutif. L’importance et même une certaine prééminence du Président sont affirmés (article 5 sur l’arbitrage, article 8 qui lui confie la nomination du premier ministre, article 16 relatif aux pouvoirs exceptionnels) bien que le Premier ministre soit dotée lui aussi de prérogatives importantes (article 21 : « il dirige l’action gouvernementale ». Le premier mandat de Président de la Vème République a été attribué par un collège électoral de 80 000 grands électeurs. On constate que la Constitution de 1958 met fin à « un régime d’assemblée » et qu’elle redonne au gouvernement les moyens de gouverner.

2/ le bicamérisme du pouvoir législatif

Le bicamérisme est une division du pouvoir législatif.

Cette division du pouvoir législatif consiste simplement en la création de deux chambres législatives au lieu d’une assemblée unique. C’est l’article 24 de la constitution qui fixe le bicamérisme de la Véme république en déclarant que « le Parlement comprend l’Assemblée Nationale et le Sénat ». La conception du bicamérisme de cette constitution fait directement écho à celle de la constitution de la IVéme République de 1946. En effet, le Sénat, appelé Conseil pour la République, sous la IVéme république était relégué à un simple rôle consultatif décidé par l’Assemblée nationale. Donc cette chambre n’avait qu’un rôle mineur. La Véme République procède à un rééquilibrage entre les deux chambres.

  • L’assemblée nationale est élue au suffrage universel direct ; en cela elle dispose d’une certaine supériorité.
  • Le sénat est élu par un suffrage indirect, il représente les collectivités territoriales. De même, dans la procédure législative, l’Assemblée nationale à la main mise sur la décision finale.

Il apparait que la Constitution de 1958 établie un régime parlementaire rationalisé, dans lequel la séparation souple des pouvoirs est permise par des moyens d’actions réciproques et caractérisé par certains critères théoriques du parlementarisme. Mais la lecture textuelle de ce partage des compétences demeure complexe. En effet, la pratique institutionnelle va tendre vers une présidentialisation du régime.

II/ Du régime parlementaire rationalisé au régime présidentialiste ?

La nature parlementariste de la Vème République est assez vite remise en cause par une présidentialisation du régime provoquée par un engrenage irrévocable de révisions constitutionnelles clés et par une personnalisation du pouvoir.

Cette mutation institutionnelle va du fait de la concentration des pouvoirs au profit du Président amener une confusion des pouvoirs.

La remise en cause de la séparation souple des pouvoirs (A/) entraine des dérives présidentialistes : une concentration du pouvoir (B/).

A/ La remise en cause de la séparation souple des pouvoirs

Une Constitution forme un tout, dans lequel toute modification visant à moderniser les institutions peut introduire une mutation de la pratique institutionnelle, des incohérences constitutionnelles et à terme par supposition, un changement de régime.

En effet, à partir de 1962 on assiste à la remise en cause de la séparation souple des pouvoirs par la mise en place d’un régime tendant à une séparation stricte des pouvoirs.

1/ le bouleversement de la fonction présidentielle : les révisions constitutionnelle

Deux modifications constitutionnelles ont bouleversé totalement le régime de Vème République :

  • La première est l’élection du président de la République au suffrage universel direct adoptée par la loi constitutionnelle du 6 novembre 1962.
  • La seconde est la réduction du mandat présidentiel à cinq ans en octobre 2000.
  • On ajouter à cela la réforme de modernisation des institutions de 2008 qui tend vers un renforcement de la fonction présidentielle.

Ce renforcement de la prééminence présidentielle est corroboré par la possibilité de venir s’exprimer devant les parlementaires réunis en Congrée.

Chirac, Hollande, Macron, Sarkosy, VGDE, Mitterand, Macron : les présidents de la Vème République.
La réforme va nécessairement renforcer la présidentialisation du régime, en resserrant encore le lien entre le Président et sa majorité déjà favorisé par la coïncidence des majorités parlementaires et présidentielles (2002).
2/ une séparation stricte des pouvoirs

Les moyens d’actions réciproques entre les pouvoirs caractérisant la séparation souple des pouvoirs vont tomber en désuétudes.

Depuis 1997, la dissolution apparait comme une arme tactique mais avec l’instauration du quinquennat elle est devenue suicidaire. En cela, la Vème République s’éloigne du régime parlementaire. De même, le fait majoritaire rend improbable la déposition d’une motion de censure.

La bipolarisation du régime rend quasi-impossible ce type d’action.

L’exception demeure en période de cohabitation, cette hypothèse est survenue trois fois sous la Vème République (1986-1988, 1993-1995 et 1997-2002).

Une bipolorasition de la vie politique.
Lorsqu'il a le soutien de la majorité parlementaire il joue un rôle primordial mais si celle-ci lui fait défaut alors son rôle est nettement plus effacé.
Constitutionnellement, le chef de l'État assure la représentation de la France à l'étranger et d cide de l'orientation de la politique étrangère (son domaine réservé parfois partagé dans le cas d'une cohabitation) alors que le premier ministre assure la gestion des affaires intérieures. Les cohabitions sont dénoncés par la classe politique, mais la solution qui consisterait à remettre en cause l’élection du Président au SUD afin de donner une lecture plus parlementariste et plus cohérente aux institutions, apparait impossible.

B/ les dérives présidentialistes : la concentration des pouvoirs

La présidentialisation de la Vème République introduit une concentration des pouvoirs dans les mains d’un seul, le président de la République. On assiste à l’instauration d’un monocéphalisme de fait et à l’effacement progressif de la distinction traditionnelle entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.

1/ l’instauration d’un monocéphalisme de fait

Une fois en place un président de la République n’a d’autre ambition que de mettre en œuvre le programme présidentiel sur lequel il a été élu. Il ne peut pas se comporter comme un simple arbitre des intérêts nationaux. Le Premier ministre est alors relégué à un rôle de subalterne, servant de responsable à un Chef de l’Etat ne pouvant plus quitter sa fonction première si facilement.

L’illustration de cette vassalisation du Premier ministre est le pouvoir non consacré dans la Constitution de révoquer le Premier ministre (pratique de la lettre de démission en blanc). Le Premier ministre n’est pas responsable devant le Président de la République. Pourtant, le premier Premier ministre de la Vème République, M. Debré a démissionné à la demande du Président de la République le 14 avril 1962 comme le firent par la suite d’autres Premier ministres (J. Chaban-Delmas en 1972 ; P. Mauroy en 1983 ; M. Rocard en 1991 ; E. Cresson en 1992).

Les formules employées par les différents Présidents de la république et de leurs Premiers ministres attestent de la relation de subordination qu’il existe alors entre les deux hommes. Ainsi Charles de Gaulle disait dans une conférence de presse de 1964 :

« La nature, l’étendue, la durée de la tache impliquent qu’il ne soit pas absorbé sans relâche et sans limite par la conjoncture politique, parlementaire, économique et administrative : au contraire c’est là le lot, aussi complexe et méritoire qu’essentiel du Premier ministre ».

On parle alors de Premier ministre « fusible » ou « rempart » .

2/ l’effacement de la distinction traditionnelle entre pouvoir exécutif et législatif

On constate que le chef du parti dispose à la fois du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif ; directement du premier à travers le gouvernement et indirectement du second grâce à sa majorité présidentielle. Le pouvoir de gouverner et de légiférer fusionne en un nouveau « pouvoir d’Etat ». Durant les élections présidentielles, le futur président donne les orientations de son programme. Une fois investie à l’Élysée, il impulse les réformes de son programme en « gardant le cap » ; si nécessaire, les réformes sont passées en force. Comme l’évoque Maurice DUVERGER dans son ouvrage « Échec au Roi », la véritable frontière entre exécutif et législatif passe désormais entre la majorité et opposition.

L’opposition, la pression publique et médiatique constituent désormais un contre pouvoir.

 

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Simon

Juriste et ancien élève de l'UPPA et de la Sorbonne, je mets à dispositions mes TD, notes et fiches de cours pour aider les étudiants. N'hésitez à poser vos questions en commentaire : On essaiera de vous aider en faisant de notre mieux !