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C'est parti

Charles Baudelaire : un grand poète français

Qui est Charles Baudelaire, le poète français ?
Baudelaire était un artiste surprenant, à la vie tourmentée et à la plume subtile ! (source : L'Express)

Charles Baudelaire est un poète français né le 9 avril 1821 à Paris et mort le 31 août 1867 dans la même ville. Il fait partie des plus célèbres auteurs du XIXème siècle de par son talent, mais aussi pour ses particularités : il a popularisé le poème en prose et a inclu la modernité comme motif poétique.

Il est donc devenu un poète majeur de l'histoire mondial et ses œuvres sont des classiques. Ses thèmes sont multiples :

  • Les liens entre le mal et la beauté,
  • Les liens entre le bonheur et l'idéalisme,
  • Les liens entre la violence et la volupté,
  • Les liens entre le poète et le lecteur,
  • La gravité du poème,
  • Le scandale,
  • La mélancolie,
  • L'envie d'ailleurs,
  • La beauté extraite de l'horreur.

Charles Baudelaire faisait partie des poètes français les plus célèbres. Voici un tableau récapitulatif des plus grands poètes de notre pays :

NomDates
Christine de Pizan1364 – 1430
Pierre De Ronsard1524 – 1585
Victor Hugo1802 – 1885
Charles Baudelaire1821 -1867
Arthur Rimbaud1854 – 1891
Paul Verlaine1844 – 1896
Guillaume Apollinaire1880 – 1918
Louis Aragon1897 – 1982
Jacques Prévert1900 – 1977

Le texte de L'Invitation au Voyage

De quoi parle la poésie L'Invitation au Voyage de Baudelaire ?
Baudelaire nous invite à faire un voyage le temps d'une lecture !

"Mon enfant, ma sœur,
Songe à la douceur
D’aller là-bas vivre ensemble !
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble !
Les soleils mouillés
De ces ciels brouillés
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
De tes traîtres yeux,
Brillant à travers leurs larmes.

Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.

Des meubles luisants,
Polis par les ans,
Décoreraient notre chambre ;
Les plus rares fleurs
Mêlant leurs odeurs
Aux vagues senteurs de l’ambre,
Les riches plafonds,
Les miroirs profonds,
La splendeur orientale,
Tout y parlerait
À l’âme en secret
Sa douce langue natale.

Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.

Vois sur ces canaux
Dormir ces vaisseaux
Dont l’humeur est vagabonde ;
C’est pour assouvir
Ton moindre désir
Qu’ils viennent du bout du monde.
– Les soleils couchants
Revêtent les champs,
Les canaux, la ville entière,
D’hyacinthe et d’or ;
Le monde s’endort
Dans une chaude lumière.

Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté".

Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal (1857)

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Marie Daubrun : l'inspiration du poème

Qu'est-ce que le cycle Marie Daubrun dans Les Fleurs du Mal ?
Marie Daubrun était l'une des muses du poète !

"Mon enfant, ma sœur" : Baudelaire et Théodore de Banville s'accordaient pour souligner le caractère enfantin des traits du visage de Marie Daubrun, qui a très certainement inspiré ce poème. Un visage "Où l'enfance s'allie à la maturité" (Le Beau Navire - FdM - LII).

Dans sa critique sur l'œuvre de Banville ("Réflexions sur quelques-uns de mes contemporains", publié pour la première fois dans la Revue fantaisiste du 15 août 1861), Baudelaire écrit : "...encore faudra-t-il doter la femme d'un genre de beauté tel que l'esprit ne peut le concevoir que comme existant dans un monde supérieur".

Or, je me souviens qu'en trois ou quatre endroits de ses poésies notre poète [Théodore de Banville, note de PMV], voulant orner des femmes d'une beauté non comparable et non égalable, dit qu'elles ont des têtes d'enfant. C'est là une espèce de trait de génie particulièrement lyrique, c'est-à-dire amoureux du surhumain.

Il est évident que cette expression contient implicitement cette pensée, que le plus beau des visages humains est celui dont l'usage de la vie, passion, colère, péché, angoisse, souci, n'a jamais terni la clarté ni ridé la surface.

J'ai lu de très nombreux commentaires, corrigés types et explications du poème, et j'ai été troublé que personne ne s'arrête vraiment sur ce vers. C'est pourtant une évidence qui devrait interpeller tout potache un peu curieux, - et sans tomber dans la psychanalyse de bazar : on ne s'adresse pas à la femme qu'on aime en l'appelant : "Mon enfant, ma sœur", à moins qu'on ne soit furieusement tourmenté par l'idée de l'inceste.

Idéal de pureté ? Amour platonique ? Tristan et Iseult dormant côte à côte, chastement séparés par une épée ? Pourquoi pas ? Mais dans ce cas, on ne propose pas à cette enfant, cette sœur, d'aller "aimer à loisir, aimer à mourir"... (heureusement, on meurt rarement d'amour platonique).

Occulter ce vers, c'est éluder le sens du poème qui y est déjà annoncé. Nous en sommes certains dès cet appel : Baudelaire n'aimera pas Marie, du moins pas au sens charnel - au sens sexuel - où nous sommes tentés de l'entendre. Il se l'interdit d'emblée, en dressant entre lui et l'amante la barrière infranchissable du tabou de l'inceste.

Et nous savons aussi dès ce premier vers qu'il ne partira pas. À quoi bon, en effet, se rendre dans cette chambre décorée de meubles luisants, tendue de tapisseries, aux murs couverts de miroirs, puisqu'il ne s'y passera rien, du moins rien qui puisse inciter un majordome polisson à hasarder un œil par le trou de la serrure ?

Tout Baudelaire est là : il a lancé des invitations au voyage, il a réclamé des dépaysements, rêvé de pays inconnus, mais il hésitait six mois avant de partir pour Honfleur et l'unique voyage qu'il a fait lui a semblé un long supplice (Jean-Paul Sartre (1905-1980) - Baudelaire - Gallimard 1947).

"Des rêves ! Toujours des rêves !" avoue le poème en prose. "Vivrons-nous jamais, passerons-nous jamais dans ce tableau qu’a peint mon esprit, ce tableau qui te ressemble ?" La réponse est évidemment non. Cette invitation au voyage n'est qu'une invitation au rêve. Dans le poème en prose, cette enfant, cette sœur est présentée comme une vieille amie.

Dans le Chant d'automne (FdM - LVI), elle est à la fois mère, amante ou sœur :

"Et pourtant aimez-moi, tendre cœur ! soyez mère,
Même pour un ingrat, même pour un méchant ;
Amante ou sœur, soyez la douceur éphémère
D’un glorieux automne ou d’un soleil couchant".

Analyse de la poésie de Baudelaire

Comment étudier un poème de Charles Baudelaire ?
Les poèmes de Baudelaire sont régulièrement étudiés en cours de français !

Il faut se référer à l'énigmatique lettre non datée adressée à Madame Marie :

"...mais soyez tranquille, vous êtes pour moi un objet de culte, et il m'est impossible de vous souiller (...) C'est un sentiment vertueux qui me lie à jamais à vous. En dépit de votre volonté, vous serez désormais mon talisman et ma force. Je vous aime, Marie, c'est indéniable ; mais l'amour que je ressens pour vous, c'est celui du chrétien pour son Dieu".

"Songe à la douceur / D'aller là-bas vivre ensemble !" : On notera les sonorités étouffées des vocaloïdes on (mi-ouverte postérieure arrondie nasalisée), ou (fermée postérieure arrondie), eu (mi-ouverte antérieure arrondie), et l'on dira que le poète utilise de douces sonorités voilées, assourdies, mates, ouatées.

Le professeur sera content de découvrir un cœur de poète battre dans la poitrine du potache et lui mettra une bonne note. Et il l'excusera de passer un peu vite sur le là-bas, d'autant qu'on ne sait pas exactement où il se trouve.

Le là-bas de Baudelaire, cet endroit où l'on n'ira jamais, c'est ailleurs, bien loin d'ici, un pays que l'on ne connaît que par le rêve : Tu connais cette maladie fiévreuse qui s’empare de nous dans les froides misères, cette nostalgie du pays qu’on ignore, cette angoisse de la curiosité ? (Le Spleen de Paris).

Cette nostalgie, indique peut-être qu'il s'agit d'un pays que l'on a connu avant la naissance, dans une vie antérieure :

"J’ai longtemps habité sous de vastes portiques
Que les soleils marins teignaient de mille feux"
(La Vie antérieure - FdM - XII).

Toutefois, Baudelaire nous livrera quelques indications qui permettront au lecteur d'imaginer où se trouve plus précisément ce là-bas. Nous y reviendrons.

"Aimer à loisir, / Aimer et mourir" / : On a accroché sur la porte le panonceau "Ne pas déranger", qui dissuadera la femme de ménage de venir passer l'aspirateur au matin. Et l'on pourra tout à son aise aimer et mourir.

Affligeante banalité d'une juxtaposition de mots qui sature les romans, la poésie, les chansons et les serments amoureux jusqu'à l'écœurement. Mais Sigmund Freud (1856-1939) n'était pas encore venu expliquer que la lutte entre Eros, la pulsion de vie, et Thanatos, la pulsion de mort, était somme toute, le contenu essentiel de la vie. (Sigmund Freud - Malaise dans la civilisation).

"Au pays qui te ressemble" : Voici un thème cher à Baudelaire, la correspondance, l'analogie (voir le poème Correspondance) entre la femme et le paysage. On mettra ce texte en relation avec Ciel brouillé (FdM - L) :

"Tu ressembles parfois à ces beaux horizons
Qu'allument les soleils des brumeuses saisons..."

Ou avec Causerie (FdM - LV) :

"Vous êtes un beau ciel d'automne, clair et rose !"

Ou encore avec À celle qui est trop gaie (Pièces condamnées) :

"Ta tête, ton geste, ton air
Sont beaux comme un beau paysage ;
Le rire joue en ton visage
Comme un vent frais dans un ciel clair".

Femme-paysage où l'on se promène, comme sur la montagne formée par La Géante (FdM - XIX) :

"Parcourir à loisir ses magnifiques formes ;
Ramper sur le versant de ses genoux énormes,
Et parfois en été, quand les soleils malsains,

Lasse, la font s’étendre à travers la campagne,
Dormir nonchalamment à l’ombre de ses seins,
Comme un hameau paisible au pied d’une montagne".

Femme-objet, femme-bibelot, femme-miroir, femme-tableau qu'on accroche au mur et qu'on contemple, mais femme silencieuse, sans voix, femme muette. "Sois charmante et tais-toi", dit Baudelaire dans Sonnet d'automne (FdM - LXIV). Et dans le même sonnet, la femme ne parle que par les yeux : "Ils me disent, tes yeux, clairs comme le cristal..."

"Et, bien que votre voix soit douce, taisez-vous !
Taisez-vous, ignorante ! âme toujours ravie !"
(Semper eadem - FdM - XL)

"Ô Lune de ma vie ! emmitoufle-toi d’ombre ;
Dors ou fume à ton gré ; sois muette, sois sombre,
Et plonge tout entière au gouffre de l’Ennui" ;
(Le Possédé - FdM - XXXVII)

La femme baudelairienne ne parle pas. Elle va criant sur les places publiques (Bénédiction - FdM - I), elle persécute l'Assassin qui soupire, enfin libéré : "Lorsque je rentrais sans un sou / Ses cris me déchiraient la fibre" (Le vin de l'assassin - FdM - CVI). Elle est comme Le Chat (FdM - LI) qui se promène ainsi qu'en son appartement : "Quand il miaule, on l'entend à peine (...)" et

"Pour dire les plus longues phrases,
Elle n’a pas besoin de mots".

"Aimer à loisir, / Aimer et mourir / Au pays qui te ressemble" : Mais pourquoi pas plutôt aimer et vivre, ici et maintenant ? Pourquoi aller chercher un impossible là-bas pour y vivre un impossible amour ?

Me revient à l'esprit une phrase de Denis de Rougemont (1906-1985) dans L'Amour et l'Occident (1939) : Aimer, au sens de la passion, c’est le contraire de vivre. C’est un appauvrissement de l’être, une ascèse sans au-delà, une impuissance à aimer le présent sans l’imaginer comme absent, une fuite sans fin devant la possession.

"Les soleils mouillés / De ces ciels brouillés" : On notera bien sûr l'oxymore soleil mouillé et l'allitération des y (le phonème [j] ), ça rapporte au moins un point sur la copie. Si l'on ajoute qu'il s'agit d'une  consonne spirante palatale voisée, on aura droit au respect de son professeur.

Les plus consciencieux relèveront qu'on trouve l'expression soleil mouillé dans la nouvelle La Fanfarlo : "sa tristesse rayonnait d'espérance comme un soleil mouillé",...

"Pour mon esprit ont les charmes" : le mot doit être pris dans son sens le plus fort, sortilège, envoûtement, ensorcellement, et non pas dans le sens affadi où l'on l'entendons aujourd'hui : grâce, attrait, agrément.

"Si mystérieux / De tes traîtres yeux" : la diérèse sur mystéri-eux allonge le vers et prolonge le mystère, mais l'on s'interrogera surtout sur les traîtres yeux. Les yeux équivoques, le regard empoisonné, venimeux de la belle sorcière, de l'adorable sorcière (L'Irréparable - FdM - LIV) reviennent souvent dans les poèmes du cycle Marie Daubrun. Ainsi :

"Tout cela ne vaut pas le poison qui découle
De tes yeux, de tes yeux verts"
(Le Poison - FdM - XLIX)

"Ton œil mystérieux (est-il bleu, gris ou vert ?)
Alternativement tendre, rêveur, cruel",
(Ciel brouillé - FdM - L)

Le poète Théodore de Banville, ami et rival de Baudelaire, notera aussi ce thème dans les yeux de Marie Daubrun :

"Il me faut bénir ta blonde toison,
Tes beaux yeux armés pour la trahison", (Améthystes XI)

N'oublions pas que Marie Daubrun était actrice, et que le comédien est double, Diderot (1713-1784) a développé ce thème dans son Paradoxe sur le comédien : Il n'est pas le personnage, il le joue et le joue si bien que vous le prenez pour tel : l'illusion n'est que pour vous ; il sait bien, lui, qu'il ne l'est pas. (Diderot : Paradoxe sur le comédien).

La grande actrice est, toujours selon Diderot, comme la courtisane qui ne sent rien mais qui se pâme entre vos bras. Si toutes les femmes sont capables (comme tous les hommes, d'ailleurs) de traîtrise et de duplicité, l'actrice, celle dont le métier est de jouer des personnages - (des masques, au sens grec) est une professionnelle dans cet art délicat.

"Mais non ! ce n’est qu’un masque, un décor suborneur,
Ce visage éclairé d’une exquise grimace,

Et, regarde, voici, crispée atrocement,
La véritable tête, et la sincère face
Renversée à l’abri de la face qui ment".
(Le Masque - FdM - XX)

"Brillant à travers leurs larmes" : L'orgueil de l'homme le convaincra facilement que ces larmes sont sincères et ne coulent que pour lui. Ces yeux brillants et mouillés apparaîtront comme une correspondance des soleils mouillés évoqués deux vers plus haut, mais on pourra légitimement se demander ce qui fait pleurer l'amante, si ce n'est la fantaisie un peu perverse du poète :

"Que m’importe que tu sois sage ?
Sois belle ! et sois triste ! Les pleurs
Ajoutent un charme au visage,
Comme le fleuve au paysage ;
L’orage rajeunit les fleurs".
(Madrigal triste - FdM - Addition à la 3ème édition - VII)

Et l'on se rappellera la définition du beau de Baudelaire, telle qu'il l'énonce dans ses Journaux intimes :

"J’ai trouvé la définition du Beau, – de mon Beau. C’est quelque chose d’ardent et de triste, quelque chose d’un peu vague, laissant carrière à la conjecture. Je vais, si l’on veut, appliquer mes idées à un objet sensible, à l’objet, par exemple, le plus intéressant dans la société, à un visage de femme. Une tête séduisante et belle, une tête de femme, veux-je dire, c’est une tête qui fait rêver à la fois, – mais d’une manière confuse, – de volupté et de tristesse ; qui comporte une idée de mélancolie, de lassitude, même de satiété, – soit une idée contraire, c’est-à-dire une ardeur, un désir de vivre, associé avec une amertume refluante, comme venant de privation ou de désespérance. Le mystère, le regret, sont aussi des caractères du Beau". (Journaux intimes - Fusées)

Les yeux de Marie Daubrun ne se laissent jamais voir clairement. Ici, son regard est brouillé par les larmes. Dans le poème Ciel Brouillé (FdM - L), il est d'une vapeur couvert. La sagesse populaire affirme que les yeux sont le miroir de l'âme. Parce que ses yeux sont toujours voilés, on ne voit pas l'âme de Marie, elle est aussi trouble, aussi opaque que son regard.

J'ai écrit : pervers ? Ce n'est pas politiquement correct de le dire, mais il serait malhonnête de le taire : il y a de la perversité chez Baudelaire, qui aime tant contempler ces femmes en pleurs pour y découvrir la douleur qui fascine (À une passante - FdM - XCIII). On ne peut s'empêcher de pressentir un petit quelque chose de sadomasochiste, le charme discret de la cruauté.

On retrouve ces traits pervers dans nombre de témoignages. Ainsi, Nadar relate cette anecdote qui n'est pas sans rappeler la scène 2 de l'acte III du Don Juan de Molière (1622-1673), au cours de laquelle le libertin dit au pauvre : "ha, ah, je m'en vais te donner un Louis d'or tout à l'heure, pourvu que tu veuilles jurer"...

"Plus tard, et cette fois du vilain.
On est à table, au dessert.
L'enfant guigne le compotier aux gâteaux, tend sa petite main
Baudelaire a pris un gâteau qu'il présente, à distance
- Oui, mais tu vas dire : Je suis un gourmand !
- Je suis un gourmand - et le petit bras s'allonge
- Pas encore ! Dis : - Je suis un misérable gourmand !
Ce mauvais jeu ne me va pas du tout : et le regard de la mère, donc ! Énervé, j'ai saisi et donné au petit le gâteau, avant que Baudelaire ait arrêté mon bras, me disant très grave, en reproche :
- Mais nous pouvions en obtenir davantage..." - Nadar, Charles Baudelaire intime : le poète vierge

Plus inquiétant : Le romancier et journaliste Louis Poupart-Davyl (1835-1890), qui fut un intime de Baudelaire, raconte dans Le Figaro du 15 août 1880, sous son pseudonyme de Pierre Quiroul, un étrange comportement du poète :

"Un soir, nous nous trouvions dans je ne sais plus quelle brasserie, et le poète des Fleurs du Mal racontait je ne sais quoi... d'énorme. Une femme blonde, assise à notre table, écoutait tout cela, les yeux écarquillés et la bouche ouverte. Tout à coup, le narrateur s'interrompant, lui dit : Mademoiselle, vous que les épis d'or couronnent et qui, si superbement blonde, m'écoutez avec de si jolies dents, je voudrais mordre dans vous et, si vous daignez me le permettre, je vais vous dire comment je désirerais vous aimer. - Au reste, vous aimer autrement me semblerait, je vous l'avoue, assez banal. - Je voudrais vous lier les mains et vous pendre, par les poignets, au plafond de ma chambre ; alors je me mettrais à genoux et je baiserais vos pieds nus." Frappée de terreur, la blonde s'enfuit. Si elle court encore, elle a dû aller loin, car il y a longtemps de cela. Le poète était très sincère. Il ne l'avait rêvée, pendant un moment, que pendue ; il nous en parla jusqu'à minuit".

Plus inquiétant encore, cette phrase dans les Journaux intimes (Mon cœur mis à nu) : "De la nécessité de battre les femmes...".

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Mathieu

Professeur d'histoire, de français et d'anglais dans le secondaire et le supérieur. J'aime la littérature, les jeux vidéo et la tartiflette. La dalle angevine me donne soif de savoirs !