La grammaire est une chanson douce est un roman écrit par l’académicien Erik Orsenna et publié en 2001.

Il s’agit d’une histoire en deux tomes qui connaîtra sa suite avec l’opus Les chevaliers du subjonctif, paru en 2003.

En sa qualité d’académicien, Orsenna conduit en fait une histoire lui servant de prétexte à présenter les joies associées à la langue française, ce qui se laisse d’emblée deviner depuis le titre. Ce prétexte va même jusqu’à faire des mots de véritables êtres vivants.

C’est donc un livre qui rend toute sa part à la vitalité de la langue et rappelle qu’il s’agit d’une chose à savourer, susceptible d’émerveiller celui qui s’y intéresse un tant soit peu.

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Brève présentation de l’auteur

Erik Orsenna, de son vrai nom Erik Arnault, est un auteur français né le 22 mars 1947, et membre de l’Académie française depuis 1998.

Après avoir obtenu le diplôme de l’Institut d’études politiques de Paris et un doctorat en sciences économiques à l’Université Panthéon Sorbonne, il devient chercheur-enseignant en finance internationale et en économie du développement à l’université de Rouen.

Bien vite cependant, il se consacre à l’écriture, au point d’obtenir en 1988 le prix Goncourt et le prix Goncourt des Lycéens pour son roman L’Exposition coloniale

Il sera élu le 28 mai 1998 au dix-septième fauteuil de l’Académie française.

Résumé du roman

L’histoire s’ouvre sur la présentation de Jeanne, héroïne et narratrice du roman. Il s’agit donc d’un roman écrit à la première personne. Elle explique également sa situation familiale et parle de son frère Thomas. Tous les deux vivent avec leur mère, mais loin de leur père.

L’histoire commence au moment du dernier jour d’école avant les grandes vacances. Elle est dans la classe de mademoiselle Laurencin, qui est l’objet d’une inspection par madame Jargonos, et qui critique beaucoup ce qu’elle voit.

Mais pour cette année, l’école, c’est fini ! Thomas et Jeanne embarquent sur un bateau pour rejoindre leur père.

Qu'est-ce qu'une subordonnée relative ?
Emil Nolde, Meer bei Alsen, 1910. Foto © Sotheby's (barnebys.de)

Malheureusement, une tempête très violente provoque leur perte : le bateau des deux enfants coule au large de l’Amérique.

Jeanne et Thomas survivent cependant. Ils se réveillent sur une île inconnue… et complément muets ! Ils ne peuvent plus du tout parler et, chose étrange, ils voient des mots flotter sur la mer.

Mais, dans leur malheurs, arrive une aide salutaire : ce sont monsieur Henri et son neveu qui arrivent. Les deux habitants de l’île viennent au secours des enfants : monsieur Henri n’est pas étonné par leur mutisme et leur assure que cette île est magique et qu’elle leur rendra la parole. Il les emmènent ensuite jusqu’au village. Commence alors pour eux comme pour le lecteur la découverte de ce nouveau monde étrange.

Au marché, ils rencontrent par exemple des commerçants peu ordinaires : c’est un marché de mots ! Ils font également la visite de curieux magasins, qui ont des noms comme L’ami des poètes et de la chanson, Au vocabulaire de l’amour, Dieudonné appeleur diplômé des plantes et des poissons,Les gens viennent y acheter leurs mots, et Jeanne se rend alors compte, toujours muette, que son vocabulaire à elle se limitait à quelques centaines de mots, tandis qu’il en existe des milliers.

Monsieur Henri les amène ensuite en excursion : ils partent en pirogue pour accoster sur une nouvelle île, à l’air triste et désert. C’est qu’avant, elle était remplie de gens ; mais ces gens y nommaient de moins en moins les choses, ce qui a fini par faire périr tout le monde. Car malgré leurs croyances, ils ne purent pas vivre dans le silence, sans appeler les choses par leurs noms.

Une nouvelle rencontre fascine Jeanne : c’est une dame âgée qu’on appelle « nommeuse » et qui s’occupe inlassablement de prononcer avec amour des mots abandonnés, des mots oubliés, à la seule fin qu’ils vivent encore. Monsieur Henri prévient Jeanne qu’il faut protéger cette personne du dangereux monsieur Nécrole : il s’agit d’un homme de pouvoir qui cherche à supprimer les bibliothèques, car il considère que les personnes connaissant trop de mots perdent en efficacité.

La nuit suivante, Jeanne se réveille brusquement et parvient à prononcer un mot : « maman ». Le lendemain matin, c’est tout une foule de mots qui les assaille, son frère et elle.

Mais leur voyage n’est pas terminé pour autant. Monsieur Henri les conduit cette fois à la ville des mots. Du haut d’une colline, ils peuvent observer des habitants inhabituels : ce sont des mots, qui marchent, qui parlent, qui vivent !

Il y a les noms, qui sont très fiers ; il y a les articles, qui marchent juste devant les noms ; il y a les adjectifs, que les noms viennent acheter en magasin pour se marier avec l’un d’eux ou plusieurs d’entre eux, mais pour une durée incertaine. Les mots dorment aussi, et sont aussi malades ; ils vont alors à l’hôpital, et parmi eux c’est la phrase « je t’aime » qui y séjourne le plus. Car quand ces mots-là prononcés ensemble sont un mensonge, ils souffrent beaucoup.

Mais il arrive soudain un malheur aux deux enfants : Jeanne est enlevée par Nécrole. Celui-ci la fait prisonnière pour la soigner des « troubles grammaticophones » dont elle souffrirait. Il la fait suivre une horrible cure de soins pédagogiques, qui consiste en une leçon incompréhensible assurée par l’inspectrice très autoritaire, madame Jargonos.

Monsieur Henri viendra néanmoins la secourir à bord d’un fabuleux hélicoptère blanc. Thomas, quant à lui, ne s’était pas trop inquiété : il est désormais tout occupé à jouer avec sa nouvelle guitare.

L’exploration peut reprendre : monsieur Henri montre à Jeanne « l’usine la plus nécessaire de toutes les usines », qui classe les mots selon leur nature : noms, adverbes, adjectifs, etc. y papillonnent et sont attrapés pour être placés dans des volières géantes.

C’est maintenant l’heure de se rendre à la plage : il doit s’y tenir une fête géante pour l’anniversaire de la « nommeuse ». Avant de partir, le directeur de l’usine, qui est un homme aimant tant les mots qu’il en oublie de manger, lui interdit cependant d’entrer dans une pièce secrète. Évidemment, cela excite sa curiosité, et elle s’y rend malgré tout. Là, elle trouve de merveilleux personnages, qui sont plutôt des auteurs : Jean de la Fontaine, Antoine de Saint-Exupery ou encore Marcel Proust lui parlent avec des phrases extraites de leurs livres.

En arrivant à la plage, Jeanne est très étonnée de voir son frère qui reparle. Mais il use d’un langage très particulier : celui de la musique. C’est l’enchantement de la guitare qui a eu son effet !

Enfin, les deux enfants apprennent que leurs parents viendront bientôt les chercher à l’aide d’un hydravion. Le lendemain, ils arrivent en effet, mais dans deux hydravions différents, et les mots se mettent eux-mêmes à décoller. Monsieur Henri explique : les mots sont des sentimentaux qui détestent quand les personnes ne se parlent plus.

Mais il restera un espoir à Jeanne pour changer les choses, car monsieur Henri lui dit bien que « pas toujours » ne signifie pas « jamais »…

Comment se finit la pièce Le Mariage de Figaro ?
Pierre Paul Rubens, La Fête de Vénus, 1636

Les personnages

Jeanne

Elle est l'héroïne de l'histoire. Elle a dix ans et un frère de quatorze ans.

Elle se présente elle-même dès la première page :

[J'ai] le plus guerrier des prénoms : Jeanne. Je suis au fond ce que je parais en surface, douce timide et rêveuse.

C’est donc elle qui raconte sa propre histoire. Puisque c’est la narratrice, elle use de mots de son âge : c’est la raison pour laquelle le récit est conduit de manière enfantine et rêveuse.

Thomas

Il s’agit du frère de Jeanne.

Il suit moins monsieur Henri que sa sœur, mais sa présence a un grand intérêt pour le propos du livre : grâce à sa découverte d’une guitare, le lecteur comprend que la musique est un formidable moyen d’accéder aux beautés de la langue.

Mademoiselle Laurencin

Cette mademoiselle Laurencin est la professeure de français de Jeanne. Elle semble réellement passionnée par les mots.

Laurencin, en récitant, rougissait, pâlissait : c'était une véritable amoureuse... Toute blonde et jeune qu'elle était, n'avait pas peur des mots.

Madame Jargonos

Madame Jargonos est une inspectrice pointilleuse qui se fonde beaucoup sur les règles de l'écriture à proprement parler.

De fait, elle ne prend aucun plaisir vis-à-vis des mots, elle n’a aucune intuition à leur propos.

Elle s'exprime sur un ton sec et est très franc, ce qui se reflète dans son physique :

Homme ou femme ? Impossible à dire tant la sécheresse l'emportait sur tout autre caractère.

Et quand Jargonos parle :

« Je vois je vois, de l'imprécis, de l'à peu près… »

Elle refait son apparition plus loin dans l'œuvre : c’est l’institutrice responsable des terribles cures de monsieur Necrole, qui déteste lui-même les mots - ce qui veut tout dire.

Monsieur Henri

C’est l’homme qui servira de guide et d'ami aux enfants après leur naufrage.

Jeanne en fait une descriptions assez spéciale :

Un petit monsieur basané, droit comme un "i" dans son costume de lin blanc et coiffé d'un canotier.

Il est aussi musicien et continuellement à la recherche de versification. Par exemple, il demande :

Mon dernier refrain me turlupine, tu n'aurais pas une rime à « douce » et un autre à « maman » ?

Il incarne le sage, et en même temps qu’il sert de guide pour l’île, il est celui qui présente aux deux enfants tout ce qu’il y a d’aimable dans la langue française. Il fait même preuve de courage au moment de sauver Jeanne des griffes de Jargonos.

Au final, il correspond à une espèce de maître d’école idéal : il considère les mots comme des choses vivantes et accompagne les enfants par la main pour leur faire découvrir toutes leurs potentialités.

Le neveu de monsieur Henri

S’il n'a pas de grande importance dans l'histoire, il intriguera pourtant Jeanne par son  apparence :

Un ado géant, habillé de couleurs criardes... chemise à fleurs, pantalon jaune pattes d'éph et guitare en bandoulière.

Ou encore :

Il se taisait, sans doute trop occupé à faire admirer ses grands yeux verts.

La Nommeuse

Elle ne fait son apparition que dans le chapitre 7 mais elle a une importance décisive sur l’île.

Jeanne en fait cette description :

[…] pas seulement ridée mais creuvassée, ravinée, creusée, de vrais canyons, les yeux perdus sous d'invraissemblables plis et la bouche disparue au fond d'un trou.

Surtout, on peut analyser son personnage comme une allégorie, c’est-à-dire une figure de style consistant à faire d’une narration la représentation d’une idée abstraite.

Ici, la Nommeuse vient figurer l’idée selon laquelle les mots doivent être utilisés pour exister. S’ils ne sont plus jamais prononcés ou écrits par qui que ce soit, alors ils cessent d’exister.

Dans la vie réelle, ce sont les écrivains qui peuvent jouer ce rôle ; en utilisant certains mots pour leurs livres, ils maintiennent leur existence dans l’esprit de leurs lecteurs et, partant, dans la vie de la société.

Nécrole

Necrole est le gouverneur de l'archipel, bien décidé à y mettre de l'ordre. il ne supporte pas notre passion pour les mots.

On peut se demander pourquoi Orsenna a choisi le rôle de gouverneur de l’île pour le méchant de son histoire, ce qui crée directement une opposition entre l’existence des gouvernés et le gouvernement.

Cela pourrait signifier - mais ça n’est qu’une hypothèse - que la manière dont nos vies sont gouvernés - par l’argent, par le travail, par la vitesse - représente un danger pour la langue et toutes ses subtilités.

Or, comme nous l’apprend l’allégorie du village abandonné au milieu du livre, la mort de la langue, c’est aussi la mort de l’humanité…

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Le bal Mabile, Jean Béraud, 1935

L’amour de la langue

Ce roman est en fait une allégorie toute entière, qui consiste en une ode à l’amour de la langue. N’oublions pas non plus que le titre lui-même est une figure de style, à savoir une métaphore qui fait de la « grammaire » une « chanson douce »…

De fait, Érik Orsenna s’amuse à trouver toutes sortes de petites allégories au moment de faire avancer ses personnages au fond de son île magique :

  • le mutisme des deux enfants ;
  • les mots sont des personnes ou des papillons ;
  • l’usine pour classer les mots selon leur nature ;
  • la Nommeuse qui nomme les mots ;
  • Nécrole (dont le nom rappelle « nécrologie », soit la partie d’un journal où l’on annonce les décès) qui veut mettre de l’ordre dans le pays des mots ;
  • etc.

Ce roman lui sert également à plaider pour un nouveau type de pédagogie au sein de l’école. Les personnages de Nécrole et de madame Jargonos (dont le nom fait penser à « jargon »), par opposition notamment à la candeur et l’enthousiasme de monsieur Henri, invitent à remettre de la joie dans l’apprentissage, voire même de la magie.

Par toutes ces métaphores, l’auteur simplifie également la grammaire : on comprend mieux la nature et la fonction des mots grâce à l’image de l’usine ou du mariage.

Alors, si jamais vous souhaitez apprendre en rêvant, si vous voulez changer à jamais l’image qu’ont les mots pour vous, embarquez donc sur l’île magique et lisez La grammaire est une chanson douce !

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Agathe

Professeur de langues dans le secondaire, je partage avec vous mes cours de linguistique !