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C'est parti

Lecture du texte

Or je trouve, pour revenir à mon propos, qu’il n’y a rien de barbare et de sauvage en cette nation, à ce qu’on m’en a rapporté : sinon que chacun appelle barbarie, ce qui n’est pas de son usage ; comme de vrai, il semble que nous n’avons autre mire de la vérité et de la raison que l’exemple et idée des opinions et usances du pays où nous sommes. Là est toujours la parfaite religion, la parfaite police, parfait et accompli usage de toutes choses. Ils sont sauvages, de même que nous appelons sauvages les fruits que nature, de soi et de son progrès ordinaire, a produits : là où, à la vérité, ce sont ceux que nous avons altérés par notre artifice et détournés de l’ordre commun, que nous devrions appeler plutôt sauvages. En ceux-là sont vives et vigoureuses, les vraies et plus utiles et naturelles vertus et propriétés, lesquelles nous avons abâtardies en ceux-ci, et les avons accommodées au plaisir de notre goût corrompu. Et si pourtant la saveur même et délicatesse se trouve à notre goût excellente, à l’envi des nôtres, en divers fruits de ces contrées-là, sans culture. Ce n’est pas raison que l’art gagne le point d’honneur sur notre grande et puissante mère nature. Nous avons tant rechargé la beauté et richesse de ses ouvrages par nos inventions, que nous l’avons du tout étouffée. Si est-ce que, partout où sa pureté reluit, elle fait une merveilleuse honte à nos vaines et frivoles entreprises. [...]

Nous les pouvons donc bien appeler barbares, eu égard aux règles de la raison, mais non pas eu égard à nous, qui les surpassons en toute sorte de barbarie. Leur guerre est toute noble et généreuse, et a autant d’excuse et de beauté que cette maladie humaine en peut recevoir ; elle n’a autre fondement parmi eux, que la seule jalousie de la vertu. Ils ne sont pas en débat de la conquête de nouvelles terres, car ils jouissent encore de cette liberté naturelle, qui les fournit sans travail et sans peine, de toutes choses nécessaires, en telle abondance qu’ils n’ont que faire d’agrandir leurs limites. Ils sont encore en cet heureux point, de ne désirer qu’autant que leurs nécessités naturelles leur ordonnent ; tout ce qui est au delà est superflu pour eux. Ils s’entr’appellent généralement ceux de même âge, frères ; enfants, ceux qui sont au-dessous ; et les vieillards sont pères à tous les autres. Ceux-ci laissent à leurs héritiers en commun, cette pleine possession de biens par indivis, sans autre titre que celui tout pur que nature donne à ses créatures, les produisant au monde.

Montaigne, « Des cannibales », Essais, Livre I, Chapitre 31

Méthode du commentaire composé

On rappellera ici la méthode du commentaire composé vu en cours francais :

Partie du commentaireViséeInformations indispensablesÉcueils à éviter
Introduction- Présenter et situer le texte dans le roman
- Présenter le projet de lecture (= annonce de la problématique)
- Présenter le plan (généralement, deux axes)
- Renseignements brefs sur l'auteur
- Localisation du passage dans l'œuvre (début ? Milieu ? Fin ?)
- Problématique (En quoi… ? Dans quelle mesure… ?)
- Les axes de réflexions
- Ne pas problématiser
- Utiliser des formules trop lourdes pour la présentation de l'auteur
Développement - Expliquer le texte le plus exhaustivement possible
- Argumenter pour justifier ses interprétations (le commentaire composé est un texte argumentatif)
- Etude de la forme (champs lexicaux, figures de styles, etc.)
- Etude du fond (ne jamais perdre de vue le fond)
- Les transitions entre chaque idée/partie
- Construire le plan sur l'opposition fond/forme : chacune des parties doit impérativement contenir des deux
- Suivre le déroulement du texte, raconter l'histoire, paraphraser
- Ne pas commenter les citations utilisées
Conclusion- Dresser le bilan
- Exprimer clairement ses conclusions
- Elargir ses réflexions par une ouverture (lien avec une autre œuvre ? Événement historique ? etc.)
- Les conclusions de l'argumentation- Répéter simplement ce qui a précédé

Ici, nous détaillerons par l'italique les différents moments du développement, mais ils ne sont normalement pas à signaler. De même, il ne doit normalement pas figurer de tableaux dans votre commentaire composé. Les listes à puces sont également à éviter, tout spécialement pour l'annonce du plan.

En outre, votre commentaire ne doit pas être aussi long que celui ici, qui a pour objectif d'être exhaustif. Vous n'aurez jamais le temps d'écrire autant !

Commentaire composé de l'extrait

Introduction

Montaigne est un humaniste du XVIème siècle, principalement connu pour son oeuvre Les EssaisCet écrit est dominé par le souci d'étudier l'homme à travers tous les siècles de l'Histoire.

On découvre dans cet extrait du Livre I, chapitre 31 l'esprit critique de Montaigne à travers sa comparaison entre civilisé et barbare. Ce texte constitue d'ailleurs un témoignage important pour saisir la manière dont l'Europe voyait le Nouveau Monde. C'est en effet à cette époque que le Portugal, l'Espagne et la France partent en conquête vers l'Amérique ; ils y découvrent des sociétés en tout points différents d'eux.

Montaigne s'attache donc ici à dénoncer la vision éthnocentrée des Européens et à démontrer comment les idées reçues faussent la compréhension de populations qu'il considère, lui, comme vertueuses.

Qui est l'auteur des Essais ?
Michel de Montaigne

Annonce de la problématique

En quoi Montaigne estime-t-il le Sauvage moins barbare que l'Homme dit civilisé ?

Annonce du plan

Nous verrons dans un premier temps comment Montaigne critique sévèrement les Européens ; dans un second temps, nous étudierons la manière qu'a l'auteur de louer les pratiques des Sauvages.

Développement

Une violente critique des Européens civilisés

Des reproches fondés sur l'ethnocentrisme européen

Toute la thèse de Montaigne est contenue dès la première phrase :

« il n'y a rien de barbare et de sauvage dans cette nation »

De fait, par cette remarque, Montaigne invite son lecteur à se débarrasser de sa vision ethnocentriste. Pour rappel, l'ethnocentrisme est, selon la définition du CNRTL, un :

« comportement social et attitude inconsciemment motivée qui conduisent à privilégier et à surestimer le groupe racial, géographique ou national auquel on appartient, aboutissant parfois à des préjugés en ce qui concerne les autres peuples ».

Montaigne reproche aux Européens de se considérer comme une nation civilisée - donc supérieure -, ce qui invite à voir les autres cultures, les autres civilisations, comme barbares - donc inférieures. Les penseurs européens jugent le « bon » d'après leur propre mode de vie, estimant « mal » ou « mauvais » tout ce qui n'est pas comme eux.

Que critique Montaigne dans ses essais ?
Fernando Richart Montesinos, Entrada triunfal en Valencia de Jaime I el Conquistador, 1884 - Les Conquistadors sont les soldats espagnols qui ont colonisé l'Amérique du Sud

C'est le sens de la formule qui termine la phrase :

« chacun appelle barbarie, ce qui n’est pas de son usage ; comme de vrai, il semble que nous n’avons autre mire de la vérité et de la raison que l’exemple et idée des opinions et usances du pays où nous sommes. »

La barbarie est ainsi relative et n'a pas d'existence absolue. Tout l'enjeu du texte est donc de retourner ce point de vue ethnocentriste pour montrer que les barbares ne sont pas ceux que l'on croit.

Pourquoi l'Europe est la civilisation barbare

Montaigne commence sa critique par une antithèse, à partir de la conjonction de coordination « or », qui engage vers une opposition. Il marque par là son désaccord avec l'idée selon laquelle les barbares seraient des barbares. Pour lui, c'est bien plutôt les Européens qui peuvent répondre à cette appellation et il entend démontrer cette « vérité » ; il est l'intellectuel qui réfléchit et décèle les vraies choses.

De fait, les Européens sont coupables d'avoir « altérés » par « artifice » l'« ordre commun ». Ils se sont éloignées de la pureté du monde, c'est-à-dire des vraies « vertus ». Car pour juger ce qui est « bon » ou « mal », il faut regarder la vertu d'une civilisation : c'est elle seule qui détermine le bien-fondé d'une société et de ses hommes.

Ce qui est bon s'évalue à partir des adjectifs suivants : « vraies », « utiles », « naturelles » ; c'est-à-dire les concepts y afférent : la vérité, l'utilité, la nature (au sens de naturel). Or, ce sont les Européens qui « corrompent » ces choses fondamentales du bien. On notera, pour appuyer son propos, que Montaigne utilise la métaphore du « fruit », résultat du processus de la nature, qui mûrit dans le respect de son environnement, sans altération.

C'est ainsi la « grande et puissante mère nature » qui décide ce qui est bien ou pas. Et à partir du moment où la civilisation européenne altère (Montaigne utilise le verbe « corrompre », c'est-à-dire altérer la pureté d'une chose) cette Nature, seule juge du bien, elle se rend coupable du mal.

De fait, à chaque fois que Montaigne parle des Européens (ce qui est décelable par l'utilisation du pronom possessif « nos » ou « notre »), le vocabulaire est négatif : « abâtardies », « corrompu », « étouffée », « honte », « vaines », « frivoles ».

La deuxième partie de l'extrait est systématiquement construite sur la figure de l'opposition, où le supposé barbare fait le bien, sur la base de la vertu, et l'Européen fait le mal, perdu par son envie. On pourra prendre pour exemple la phrase suivante :

« Ils ne sont pas en débat de la conquête de nouvelles terres, car ils jouissent encore de cette liberté naturelle, qui les fournit sans travail et sans peine, de toutes choses nécessaires, en telle abondance qu’ils n’ont que faire d’agrandir leurs limites. »

Par le début de sa phrase, Montaigne fait référence aux actions des Européens, sous-entendant : c'est nous, Européens, qui sommes en débat de la conquête de nouvelles terres.

Par l'antithèse et l'opposition, fondée sur le concept de « vertu », Montaigne use de procédés d'argumentation pour prouver à son lecteur que le barbare n'est pas là où l'on croit. On notera également le présent de vérité générale qui donne un ton très moraliste à sa démonstration.

Mais il se sert également de l'humour pour servir ce propos.

L'humour, une arme supplémentaire pour la critique

Montaigne qui utilise la première personne du pluriel, cela signifie qu'il s'assimile aux Européens. Il fait ainsi preuve d'une certaine autodérision.

En outre, par l'anaphore (procédé visant à un effet de symétrie, d'insistance, etc., par répétition d'un même mot ou groupe de mots au début de plusieurs phrases ou propositions successives, définition du CNRTL) du terme « parfait », il cherche à tourner en dérision la vision qu'ont les Européens d'eux-mêmes :

Là est toujours la parfaite religion, la parfaite police, parfait et accompli usage de toutes choses.

L'auteur mêle également astucieusement le vocabulaire mélioratif et péjoratif pour souligner l'ethnocentrisme des Européens ; et les deux termes finissent par s'annuler. Ainsi de l'oxymore (figure par laquelle on allie de façon inattendue deux termes qui s'excluent ordinairement, définition du CNRTL) « merveilleuse honte ». Interrogez-vous sur l'effet produit d'une telle formule : ne provoque-t-elle pas chez le lecteur un léger sourire ?

D'une manière générale, Montaigne ironise sur ces Européens qui jugent la société des Indiens du Nouveau Monde sans prendre de recul sur eux-mêmes comme le veut la formule d'introduction du deuxième paragraphe : « Nous les pouvons donc bien appeler barbares... ». L'auteur joue par là avec son lecteur, avec une apparente concession : appelez-les barbares si vous voulez, mais sachez que vous vous trompez !

Quelle thèse Montaigne défend-il dans les Essais ?
Les sauvages de la mer du Pacifique

Ainsi, la société la plus vertueuse est celle des prétendus barbares et Montaigne, comme il a démontré les vices des Européens, s'attache également à le démontrer.

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Des barbares bien plus civilisés du point de vue de la vertu

Inversion des termes barbares et sauvages

Montaigne opère une sorte d'inversion des sens. De la même manière qu'il invite l'Européen à prendre du recul sur sa manière de vivre, il l'invite à s'interroger sur le sens normatif du mot « sauvage », ce qui lui permet d'emblée de positiver l'image du barbare.

Ils sont sauvages, de même que nous appelons sauvages les fruits que nature, de soi et de son progrès ordinaire, a produits

En terme de réthorique, il part ainsi du terme utilisé par son époque pour les désigner, c'est-à-dire « sauvage », pour montrer tout ce que ce mot revêt de positif. Alors comme un fruit sauvage, les sauvages seraient bons parce que naturels.

Montaigne oppose ainsi l'homme civilisé et l'homme sauvage sur le modèle du fruit cultivé contre le fruit sauvage, où ce dernier est supérieur au premier. L'auteur fonctionne ainsi avec plusieurs antithèses pour inverser la vision habituelle :

  • nature contre culture
  • sauvage contre civilisé
  • « vertus » contre « propriétés »
  • « nature » contre « abâtardies »

Tout cela se fonde sur une valorisation de la nature : les sauvages, en tant qu'ils sont plus proches de la nature, sont meilleurs, car moins corrompus.

Eloge de la nature

En faisant l'éloge des sauvages, Montaigne fait l'éloge de la nature. La civilisation se voit rabaissée dans ce texte, puisqu'elle est associée à des termes péjoratifs, tandis que la nature est, elle, valorisée : « vertus », « utiles », « véritable ». Et puisque les sauvages sont les plus proches de la nature, c'est à eux que se rapportent aussi ces qualificatifs.

Voilà donc une critique sous-jacente d'un progrès qui éloignerait l'homme de l'état de nature, si appréciable pour sa pureté et la vertu à laquelle il oblige.

Il faut rappeler que Montaigne est le chantre de l'humanisme et, de fait, son propos s'y rapporte en tout point.

Comment la vertu se définie-t-elle chez Montaigne ?
Henri Rousseau, Tiger in a Tropical Storm (Surprised!), 1891

Une application de l'humanisme

On peut voir dans le deuxième paragraphe de cet extrait une mise en application des visées humanistes de Montaigne. Pour rappel, le CNRTL définit ainsi la doctrine :

Attitude philosophique qui tient l'homme pour la valeur suprême et revendique pour chaque homme la possibilité d'épanouir librement son humanité, ses facultés proprement humaines. Attitude philosophique qui tient l'homme pour la valeur suprême et revendique pour chaque homme la possibilité d'épanouir librement son humanité, ses facultés proprement humaines.

Car tout ce qui motive les supposés barbares dans leur manière de vivre est bien plus en accord avec les facultés humaines résultant de la nature. Ainsi, leur seule raison de faire la guerre est ce qui fonde notre humanité même, à savoir : « la seule jalousie de la vertu ». Ils refusent le superflu et se contentent des « nécessités naturelles ». Enfin, ils se considèrent comme une grande famille, tous ensemble, puisqu'ils n'utilisent pas les termes « frères », « enfants » ou « pères » selon le lien du sang, mais seulement relativement à l'âge. Or, qu'est-ce que l'humanisme sinon le fait d'aimer l'homme pour ce qu'il a de commun à soi-même ?

Et, à l'inverse, les Européens ont perdu cette vision de l'autre comme faisant partie du même tout que lui ; c'est bien là la raison de la prétention du civilisé par rapport à celui qu'il appelle sauvage. L'Européen s'est tant éloigné de la Nature qu'il n'y voit plus son origine.

Conclusion

Cet extrait vise donc à renverser les préjugés ethnocentriques des Européens en faisant l'éloge des sauvages. Il invite à considérer les supposés barbares d'abord comme des Hommes, ensuite comme des modèles.

Montaigne étaye sa thèse humaniste d'un Homme proche de la Nature, donc conscient d'où il vient et, partant, de ce qu'il peut être.

Ouverture

On pourrait rapprocher cette vue du mythe du bon sauvage chez Rousseau, deux siècles plus tard.

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Nathan

Ancien étudiant de classe préparatoire b/l (que je recommande à tous les élèves avides de savoir, qui nous lisent ici) et passionné par la littérature, me voilà maintenant auto-entrepreneur pour mêler des activités professionnelles concrètes au sein du monde de l'entreprise, et étudiant en Master de Littératures Comparées pour garder les pieds dans le rêve des mots.