Lorsque des
agriculteurs mettent à sac une préfecture ou même, comme en
Janvier 1999, un ministère, leur violence est reconnue par tous
comme politique et est analysée comme une forme de protestation
collective. A l'inverse, la violence des jeunes de banlieue n'est
créditée d'aucune signification, elle est souvent présentée comme
gratuite ou simplement ludique. Or, si jeu dangereux il y a, il
trouve en réalité son sens dans un certain état d'exaspération de
populations qui se perçoivent comme des victimes,, et de ( non )
dialogue entre ces populations et les pouvoirs publics. Les violences
urbaines sont fondamentalement une action politique au sens où elles
interpellent des adversaires dans ce qui est conçu comme un conflit.
Certes, ce n'est pas une violence politique au sens des errements
idéologiques révolutionnaires du passé ou du terrorisme à caution
nationaliste. C'est néanmoins une violence politique qui met en
cause l'absence de statut de citoyen fabriqué pour une partie de la
jeunesse par un système économique et social d'une part, une
tradition historique xénophobe d'autre part, un système politique
aveugle enfin.

La plupart
des sociétés comportent des sous-groupes, dont le niveau de
violence est sans commune mesure avec celui de la société, ou du
moins, avec les évaluation communes qui y prédominent : tel est le
cas des jeunes qui produisent la violence urbaine telle que définie
plus haut. Dans les groupes que ces jeunes forment, la violence
serait même à la norme : Il y serait bien vu d'avoir fait de la
prison. Ce passage crédibiliserait un individu et, ce faisant, lui
permettrait de ne plus avoir recours à la violence physique directe
pour être respecté. Dans ces conditions d'inversion de la norme,
même les luttes de pouvoir entre les jeunes d'un même groupe sont
des luttes violentes, et cela a d'énormes conséquences sur leur
espace environnant, qui est aussi celui des tiers : sur la ville, sur
son mobilier urbain, sur les transports urbains...

En tant que
victimes directes ou indirectes de ces violences, les tiers souffrent
souvent bien moins de la douleur infligée que de leur incapacité à
réagir de façon appropriée à la violence qui l'inflige,
c'est-à-dire en fait, le plus souvent, par la violence. Ainsi, une
grande partie des traumatismes dont ils souffrent après avoir été
agressés d'une manière ou d'une autre relève en fait de leur
extrême loyalisme à l'égard de l'État, lequel leur enjoint de ne
pas céder à la violence même quand celle-ci s'impose à eux. Ils
peuvent dès lors exiger des autorités en retour à ce qu'ils
ressentent comme un sacrifice, une reconnaissance qui puisse les
instituer en tant que victimes, victimes éventuellement qualifiées
pour parler et agir contre la source de la violence qui les a
atteints. Ce serait là l'ultime défi que se posent les violences
urbaines aux pouvoirs publics. En dégradant le cadre de vie de tous,
elles transformeraient chacun en producteur de doléances auxquelles
les autorités devront tôt ou tard répondre si elles ne veulent pas
perdre la confiance des citoyens ou leur obéissance... ( A noter
qu'en 2001, peu de jours avant l'élection présidentielle, un vieil
homme s'étaient fait agressé à son domicile où Jacques
Chirac, à travers de longues promesses
axées sur ce sentiment d'insécurité d'une population scandalisée,
avaient joué de cet événement pour obtenir d'avantage de vote. )

Cet
opportunisme politique est toujours d'actualité. Ainsi, ces derniers
jours, Nicolas Sarkozy,
propose d'interdire les incendiaires de voitures de passer le permis
de conduire « aussi longtemps que la victime des faits ou le
fond de garantie n'a pas été indemnisé en totalité ».
L'idée est plus de profiter du sentiment d'insécurité que de faire
pression sur les auteurs mineurs des incendies de voiture pour qu'ils
indemnisent leur victime. Effectivement, comme le fait remarquer un
avocat, « des objections de principe » s'imposent...
Premièrement, pourquoi un majeur condamné pourrait-il aussitôt
sorti du tribunal aller passer l'examen de conduite, tandis qu'un
mineur verra cette échéance suspendue jusqu'au complet paiements
des dommages-intérêt ? En principe les mineurs sont mieux traités
que les majeurs, car ils sont immatures, influençables ( notamment
par des majeurs non concernés par la mesure ), et le passage à
l'acte révèle souvent un problème plus profond. Ici on vote une
mesure qui les traitera plus durement que des majeurs... En outre, il
est absurde de proposer une mesure spécifique aux véhicules
incendiés car tout incendie est grave en soit, un feu de boîte aux
lettres peut se propager à l'édifice...

Pour finir,
dans une société où la population est urbanisée à 80%, est-il
nécessaire de préciser le caractère urbain ?

Vous avez aimé cet article ? Notez-le !

Aucune information ? Sérieusement ?Ok, nous tacherons de faire mieux pour le prochainLa moyenne, ouf ! Pas mieux ?Merci. Posez vos questions dans les commentaires.Un plaisir de vous aider ! :) 5.00 (1 note(s))
Loading...

Olivier

Professeur en lycée et classe prépa, je vous livre ici quelques conseils utiles à travers mes cours !