Chapitres
- 01. Fiche technique
- 02. Distribution
- 03. Le scénario
- 04. Thématiques du film
- 05. Points négatifs du film
Attention : le film ménage un certain suspense que nous divulguons pour les biens de cet exemple. Si vous comptez voir le film, faites-le avant de lire cette analyse.
Fiche technique
Pays d'origine : États-Unis
Langue : Anglais
Durée : 92 minutes
Genre : « Comédie dramatique »
Réalisation et scénario : Bill Guttentag (américain)
Acteurs principaux : Eva Mendes, David Krumholtz, Rob Brown, Katie Cassidy
Présenté en compétition au Festival du film américain de Deauville en 2007
Distribution
- Eva Mendes : Katy Courbet
- David Krumholtz : Rex
- Eric Lively : Brad
- Jeffrey Dean Morgan : Rick
- Katie Cassidy : Jewel
- Rob Brown : Byron
- Jay Hernandez : Pablo
- Monet Mazur : Abalone
- Andre Braugher : Don
- Beau Garrett : Krista
- 50 Cent : Lui-même
Le scénario
Le film suit, sous la forme d'un reportage (ce qui constitue une mise en abyme, soit un procédé qui reprend des actions, des manières ou des thèmes de l'œuvre principale), une jeune femme qui travaille pour la chaîne de télévision ABN, aux audiences catastrophiques.
Nous découvrons ainsi Katy Courbet, qui semble prête à tout pour faire de l'audience et sauver sa chaîne. Elle cherche donc un concept d'émission susceptible de dynamiser la chaîne déficitaire (qui perd de l'argent). Elle montre à son équipe différents concepts européens d'émissions particulièrement violentes ou décalées qui effrayent bon nombre de ses collaborateurs. Peu à peu, l'idée émerge de proposer un jeu fondé sur le principe de la roulette russe : plusieurs candidats, une arme et cinq balles seulement ; des candidats tirés au sort qui joueraient leur vie en direct ; ceux échappant à la mort gagneraient une forte somme ; le perdant, hormis la mort, n'obtiendrait rien, et sa famille non plus.
Une fois qu'elle tient son projet, la jeune femme doit convaincre les annonceurs de s'y associer, en achetant des espaces publicitaires. En effet, les fortes sommes offertes aux participants proviennent en partie de ces contributions. De prime abord, les annonceurs ne souhaitent pas s'engager ; mais rapidement, les médias s'emparent du projet qui a fuité, et le commentent, ce qui constitue une publicité gratuite pour l'émission à venir. On prend position, on en débat, on critique le projet... et le fait est qu'on en parle. Cela finit par convaincre les annonceurs du potentiel succès à venir et ils s'engagent.
Il y a encore une autre partie à convaincre : le juriste de l'émission, qui ne semble pas soutenir le projet, tant d'un point de vue juridique que personnel. Pendant ce temps, la productrice demande à l'homme qui réalisait le reportage sur elle de rencontrer les futurs participants. Chargé de dresser un portrait d'eux suscitant l'empathie d'une partie du public, il participe en plein à la logique mercantile du projet de Katy.
En définitive, les obstacles se lèvent les uns après les autres et l'émission peut avoir lieu. La sélection des candidats est drastique : conforme aux attentes des téléspectateurs, elle comprend des individus emblématiques de l'Amérique contemporaine. Les minorités sont représentées, le pathos est cultivé ; tout est fait pour que les téléspectateurs s'engagent en soutenant un candidat aux détriments des autres et suivent donc avec empathie le jeu.
Parmi les candidats, on trouve :
- Byron, un jeune écrivain
- Brad, un fan de sports extrêmes
- Rick, un homme qui a dû payer les factures exorbitantes de son fils malade
- Jewel, une jeune femme rêvant d'Hollywood
- Abalone, un top model devenue artiste performeuse
- Pablo, un jeune Mexicain gay immigré qui cherche à aider sa famille par tous les moyens
Tous ceux qui assistent à l'émission sont en effervescence. Jewel est le premier à passer, suivi de Pablo : aucun des deux ne meurt, mais la pression monte à mesure que les candidats risquent leur vie. L'audience, qui est surveillée minute par minute, croît au point d'atteindre des sommets rarement égalés.
Abalone sème la panique en réalisant un happening (une performance artistique) sur le plateau : elle menace physiquement le présentateur en déversant des propos vulgairement féministes. Mais elle finit par retourner l'arme contre elle-même et lorsqu'elle appuie sur la détente... Rien n'arrive.
Le quatrième joueur est Byron, mais là encore l'arme se révèle chargée à blanc.
C'est enfin Brad qui passe... et c'est lui qui tombe sur la balle. La stupeur se répand sur le plateau, sa petite amie est en pleurs, Katy est elle-même choquée, sentant des remords la prendre. Le corps est vite évacué et on désigne Rick comme gagnant.
Cela contribue à faire passer le choc : la joie s'empare du public, de la régie et du vainqueur. Katy refuse maintenant d'accéder à la demande de son petit ami qui lui demande de tout arrêter : elle est trop fière d'avoir imposé son idée à succès. Mais lors de la conférence de presse qui suit l'émission, un homme assassine Katy à l'aide d'une arme à feu.
Le pays est sous le choc, le magazine Time consacre sa « une » à la mémoire de la jeune femme. On loue surtout son concept révolutionnaire, et son émission, Live ! est un succès : elle sera désormais à l'affiche une fois par an, animée par l'ancienne candidate Jewel. Le caméraman qui a suivi Katy travaille maintenant pour la chaîne ABN. Le générique de fin du film est précédé d'une photographie de Katy, sur laquelle est inscrit :
In memory of Katy Courbet
Thématiques du film
Problèmes juridiques et moraux
Des problèmes juridiques importants (est-ce un jeu qui met en scène un suicide ou non ?) sont levés grâce à la persévérance de la jeune femme et à quelques compromissions avec la loi.
Peut-on et doit-on tout faire voir ? C'est une question que la jeune productrice ne se pose pas. Elle évalue son objectif - faire de l'audience - et sacrifie toute conscience à celui-ci. Exaltée à l'idée des obstacles qui se dressent devant elle et sûre que son idée fera sensation, elle ne prend aucun recul, comme absorbée par les défis qu'elle doit relever.
Réalités physiques
Quel est le prix à payer pour tant d'insouciance ?
Katy semble rattrapée par sa conscience à la fin du jeu. Elle vomit, signe d'un rejet patent de l'action commise. Sa remise en question est pourtant suivie d'un ressaisissement aveugle : cette femme est une battante, elle est carriériste et elle mesure rapidement ce que va lui apporter le défi qu'elle vient de relever. Elle laisse donc ses questionnements derrière elle et continue d'avancer.
Course au sensationnalisme et pathos
Peut-on tout accepter et doit-on tout regarder ? Dans quelle mesure le public est-il complice de ce suicide (ou simplement de cette tentative de suicide) en direct ?
L'attrait pour la mort n'est pas nouveau. Les jeux du cirque à Rome attiraient déjà les velléités sanguinaires de la foule.
La télévision va loin, trop loin, mais en sommes-nous responsables ? Oui, dans la mesure où nous la regardons. Oui également, parce que nous sommes en quête de nouveauté, de sensationnel et semblons commander ces émissions outrancières.
A notre décharge, les spectateurs ne sont pas seuls. En effet, le projet reçoit l'aval d'annonceurs qui se lancent et investissent dans le projet ; ils attendent un bénéfice record. Or, celui-ci dépend de l'audience. Lors de l'émission, l'audimat qui mesure l'audience monte en flèche à mesure que les candidats se succèdent, jusqu'à atteindre des sommets rarement égalés. C'est sans doute cette émulation qui favorise l'existence du jeu.
Les participants de Live ! ont en outre la possibilité de faire découvrir leur personnalité à travers le portrait qui est réalisé d'eux avant qu'ils ne jouent leur vie. Hormis le fait que cette présentation fasse l'objet d'un bricolage - ce qui souligne un peu mieux le caractère artificiel de tout produit télévisuel, cela prouve que l'émission cherche à attendrir et, par là, à gagner un peu plus d'attention. Plus les candidats sont appréciés, plus les téléspectateurs seront engagés.
Questions de responsabilité
Le jeu lui-même est conçu de telle sorte que chacun n'est pas apte à mesurer sa responsabilité. En effet, les spectateurs, mais aussi les organisateurs et le présentateur, ne semblent pas directement impliqués dans la mort des protagonistes, dans la mesure où il s'agit d'un jeu de hasard.
La métaphore est ainsi évidente : tout le monde se dédouane. La responsabilité est, très artificiellement, totalement assumée par les joueurs - voire même par le « destin » -, ce qui contribue à faire oublier les vrais responsables : les concepteurs.
De plus, les participants sont tous volontaires et obtiennent une contre-partie financière. En apparence, le jeu est donc moins cruel que ne le serait, par exemple, l'émission Concentration, concept de télé-réalité imaginé par Amélie Nothomb dans son livre Acide sulfurique (2005).
Points négatifs du film
Le choix du documentaire
Live ! veut être une charge violente et acide contre la télé-réalité, qui va de plus en plus loin dans l'immoralité et le voyeurisme. Mais en choisissant le documentaire pour le mettre en évidence - soit le principe de la mise en abyme -, le réalisateur tombe dans la caricature. Il perd son côté subversif et devient un peu trop moralisateur, voire « bien pensant ».
L'émission Live !
En montrant l'émission Live ! telle quelle, le film semble aussi vouloir convaincre son spectateur avec les faits mêmes qu'il dénonce. Le suspense prend le dessus sur l'aspect critique qui nourrissait la première partie du film, et si le spectateur s'inquiète du sort des candidats, c'est qu'il est placé dans le même lot que tous les téléspectateurs dénoncés par son propos.
Une fin trop rapide
Une fois l'émission Live ! terminée, on peut s'interroger sur la pertinence d'avoir expédié aussi vite la fin du film. Il en reste une impression bâclée, où l'on trouve que le réalisateur a voulu en finir au plus vite, n'ayant plus rien à dire sur son sujet.
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