notes de lectures (assorties de commentaires personnels).
principal ouvrage de référence : Architectures de la vie privée
M. Eleb & A. Delabarre-Blanchard, Ed Archives d'architecture moderne, 1989

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C'est parti

Habiter est un acte culturel autant que matériel. L'ébauche d'un discours sur la distribution des habitations marque, au début du XVIIIe, le départ de la reflexion sur l'architecture domestique comme branche  part entière de l'architecture. L'art de la distribution des pièces dans les habitations est appelé "art français" au XVIIIè s.

Celà suppose qu'auparavant, l'architecture, qu'elle soit publique ou privée, ne peut-être que l'architecture du Prince. L'histoire de l'architecture s'intéressera à autre chose que des monuments à partir du XIXè s. Précisons qu'à l'époque la notion de monument englobe les édifices religieux, les palais du pouvoir exécutif et les habitations royales. C'est en autre à la suite de Viollet-le-Duc (XIXè s.), de sa participation à l'émergence de la notion de monument puis de bâtiment historique, que l'idée de patrimoine engloba également le domestique et le roturier. (en commençant par les chateaux-forts, il est vrai !)

1 - Promiscuité et polyvalence des espaces : Au Moyen-Age, et au XVIè et début XVIIè

Au Moyen-Age, les pièces sont communicantes entre elles, ce sont des lieux de circulations autant que de séjour (il n'y a pas de couloir). Elles n'ont pas de spécificité, c'est le mobilier et l'action qui détermine la fonction. Le mobilier est d'ailleurs très limité, tout ou presque tient dans des coffres. Le moment venu, on dresse la table (au sens propre : trétau + plateau), on déroule une paillasse, etc...  (Dans les fermes, il n'y a souvent qu'une grande pièce, comportant le foyer. Il est fréquent que le bétail soit également "logé" dans l'habitation (parfois l'étable est juste séparée par une cloison à mi-hauteur), ce qui permet de bénéficier de la chaleur (et de l'odeur :-)) animale. (cette typologie était encore fréquente dans plusieurs régions françaises au début du XXè).

En ville, le partage des espaces est plutôt vertical : une maison = une habitation, au rez de chaussée on trouve coté rue la boutique ou l'atelier artisanal, souvent une cour, puis la cuisine, qui est la seule pièce de l'habitation spécialisée. A l'étage(s), une grande pièce au-dessus de chaque partie du rez-de-chaussée, dans le Vieux Lyon les deux corps de bâtiment (au dessus de la boutique et au dessus de la cuisine) sont reliés par une galerie ouverte. Ces pièces n'ont pas de terminologie précise, on les appelle indifféremment salle ou chambre.  Les caves et les greniers (étymologie = grain) sont des lieux de stockage qui ont également la propriété d'isoler du froid ou de la chaleur le reste du bâtiment.)

Au XVIIè apparaît une terminologie restreinte : outre la salle et la cuisine (domaine des serviteurs, des enfants + lieu de rangement et de travail domestique), la notion de chambre (pas encore spécifiquement nocturne) s'accomode de garde-robe et de cabinet (lieu de travail intellectuel). Les grands hôtels voient éventuellement une galerie border la cour devant le bâtiment (cours de dessin) .

Puis les grandes demeures inaugurent l'antichambre, qui est une première salle de réception, ou une salle d'attente si on a le privilège d'être reçu dans la chambre. C'est la chambre, munie éventellement d'une alcôve, qui est la "vraie" pièce de réception. La Marquise de Rambouillet fait ainsi appliquer ce nouveau modèle de distribution à la construction de son château. Sous l'influence du Concile de Trente (qui condamne le corps, la nudité, la promiscuité), le château est partagé en deux domaines, le sanctuaire des pièces habitées d'une part, les espaces de circulations inhabitées d'autre part. Les escaliers se multiplient et se spécifient,  (Madame ne
croisera plus le valet de Monsieur et inversement ...).

La grande salle disparaît en trois pièces diversifiées :
- la galerie décorée pour maisons à la mode, lieu de grande reception,
- la salle à manger (combinaison salle + antichambre)
- le salon (combinaison salle + chambre)
Autres exemples : Vaulx-le-Vicomte, Versailles...

L'ameublement est peu important, les murs sont décorés de lambris, cheminées, miroirs fixes qui signifient l'usage de la pièce. Les autres meubles se déplacent d'une pièce à l'autre et selon les moments.

L'interpénétration des différentes activités dans des espaces polyvalents devient caduque en tant que modèle de distribution, mais reste très présente dans la production banale d'habitations roturières. (en clair, chez les riches on n'a qu'une seule activité prévue par pièce, chez les pauvres on continue à tout faire dans la même et unique
pièce 🙂

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2 - Connaissance des usages et commodités : l'art de la distribution au XVIIIè s.

La distribution devient une discipline architecturale à part entière, au même titre que la construction ou la décoration. Ses auteurs sont architectes ou éventuellement médecins : on retiendra surtout Jacques François Blondel (1705-1774), premier grand théoricien d'une architecture humaine et pratique.

Mais au XVIIIè siècle, la théorie architecturale est déja constituée, et l'architecture antique reste la
référence pour les règles de composition et d'ordonancement extérieur. Se pose le problème du rapport entre l'esthétique et l'usage, notions perçues comme contradictoires par les architectes. A l'époque, le rôle de l'architecte (qui est défini comme "homme de l'art"), est d'appliquer strictement les règles d'un code esthétique strict (symétrie, décoration, place centrale de la cheminée...) sur la façade.

Dans les hotels particuliers, les commodités passeront donc après les convenances, alors que dans les maisons ordinaires d'habitation, on préfèrera la commodité à la décoration. En fait, la relation entre l'intérieur et l'extérieur du bâtiment renvoie à la place accordée à la distribution.

A la fin du XVIIIè, Nicolas le Camus de Mézière rompt avec ces règles et propose que la façade soit l'expression de la distribution intérieure (dans les fait, cela ne se réalisera que plus tard, en particulier avec le programme de la "villa" cher à Viollet le Duc, à l'Art Nouveau puis au mouvement Moderne). Mais le rapport entre l'architecte et l'habitant se modifie : l'architecte se réfère aux usages, à la vie quotidienne, et s'approprie un savoir qu'il reconnaissait auparavant comme appartenant à son client.

La notion nouvelle de commodité (= aisance = confort domestique) apparaît donc comme qualité nouvelle de la distribution, là où n'était requis que le "nécéssaire". Toutes les habitations sont maintenant dans le champ de l'architecture, quelque soit la classe sociale visée par le biais du nouvel enjeu architectural qu'est la distribution. Mais le discours des architectes se réfère à l'hôtel, à l'aristocratie urbaine (qui défini seule le "bon goût", le seul savoir-vivre possible). (Ce discours est également une description des usages spécifiques à un groupe qui se sent menacé par des mouvements sociaux importants).

Le dispositif établi est celui des appartements demi-doubles (double en profondeur, avec des pièces non traversantes) qui établit la distinction entre :
- pièces principales : chambres, salles, cabinets , sur jardin en hôtel ou sur rue en ville, (dont l'enfilade, lors de la mise en relation des pièces nobles le long de la façade démontrera la richesse de son propriétaire par les propotions et la longueur de la perspective créée)
- pièces secondaires : espaces de transition, antichambres, dégagements, vestibules, paliers, dépendances, garde-robes, ..., qui se multiplient,  générant la hierarchie des circulations par des trajets différents des maîtres, des domestiques et des visiteurs.

En résumé, les pièces se multiplient et se spécifient. Blondel distingue 6 chambres : "à coucher", "de parade", "à alcôve", "en estrade", "en niche", "à galettas". D'alembert et Diderot 3 types d'appartements (un appartement est alors un "secteur" dans un logis) : "de parade", "de société", "de commodité", plus éventuellement "des bains".

Le discours sur la distribution se réfère à un parcours privilégié, un ordonnancement des lieux et des objets, la magnification du regard guidé, la présentation hierarchisé des espaces dans un code des usages et des réceptions. Le fossé est creusé entre les rangs supérieurs et inférieurs. Les domestiques ne dorment plus dans la chambre des maîtres mais dans la garde-robe.

On voit également la création d'epaces spécifiquements féminins, chambre de parade puis boudoirs, lieux d'intimité. Une place plus importante est accordée aux appartements de commodités, comme les salles à manger qui sont de plus en pls fréquente.

Les meubles sont dit meublants (=fixes) ou courants (= allant d'une pièce à l'autre). Lorsqu'ils ne servent pas, ils sont rangés alignés le long des murs, accentuant le décor et la symétrie. petit à petit, "le meuble devient un immeuble et se fixe" pendant le XVIIIè.

Concernant les immeubles à loyer, une nouvelle organisation apparaît : ce n'est plus celle du moyen-âge (un immeuble = une famille au sens large), on a un découpage horizontal en appartements logeant chacun une famille par étage.

(Rappelons philippe Ariès, qui a décrit les transformations de la vie familiale du XVIIIè s. :  Auparavant, la vie en public et en représentation était orale, et non spatialisée. Désormais, la séparation de la vie mondaine, de la vie professionnelle et de la vie privée nécessite des locaux appropriés pour chacune d'elles (chambre, cabinet, salon). Le sentiment de confort nait alors des notions d'intimité, de discretion, d'isolement. On voit ainsi l'apparition de chambres d'enfants et de précepteurs (l'enfant était auparavant logé avec les domestiques). L'attention à l'enfant se
transforme, on séparera les âges et les sexes.)

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3 - Reproduction et transposition : début du XIXè s.

L'intérêt pour la distribution intérieure est toujours présent mais ne fait pas l'objet dun discours architectural. Si les traités du XVIIIè étaient principalement constitués de plans d'hôtels particuliers, l'architecte du XIXè s'occupe principalement des habitations dans des immeubles de rapport, appartenant à la bourgeoisie. On voit donc une transposition et une interprétation d'un modèle à l'autre, d'une classe sociale à l'autre. Le modèle individuel est appliqué à de l'habitat collectif, et, fait nouveau, le propriétaire n'est plus l'occupant, qui reste inconnu de l'architecte.

Auparavant chaque pièce principale était assortie d'au moins une ou deux pièces plus petites, cela disparaît pour assurer un meilleur rendement aux immeubles de rapport : les surfaces sont plus petites, l'organisation se cantonne à un seul niveau horizontal (pas de duplex !) Au début, la liaison salon/chambre à coucher sur la façade principale est la plus importante, la salle-à-manger, qui n'est pas "principale" peut servir d'antichambre ou de desserte. Puis la liaison des espaces "de reception" (salon/salle-à-manger) prédomine, pâle copie des galeries du siècle précédent.

La pratique de la chambre conjugale se répend, le boudoir devient moins intime, ouvert sur le salon, plus spécifiquement féminin (par opposition au fumoir), puis tombe en désuetude.

Les chambres et les bains sont regroupés dans un espace commun, les couloirs et les différents escaliers ("de service"...) continuent la mise à l'écart des domestiques. Ceux-ci sont logés en combles ou en rez-de-chaussée et définitivement mis à l'écart de l'appartement. On voit l'apparition de la chambre d'enfant dans la terminologie, de
petite taille et proche de la chambre principale.

Peu à peu, les meubles redeviennent mobiles mais restent affectés précisément à une pièce qu'ils contribuent à qualifier. La stratification hiérarchisée des étages, héritée de l'ancien régime, est transposée sans rupture à l'intérieur d'une nouvelle échelle sociale qu'est la bourgeoisie : boutiques au rez-de-chaussée et à l'entresol, "étage noble" au premier étage, le plus souvent orné d'un beau balcon, puis étages de plus en plus modestes au fur et à mesure que l'on monte,  les domestiques étant sous les toits.

Conséquence d'un effort vers une unité urbaine, les façades ne sont pas autonomes, les divers percements ne dépendent pas des pièces à éclairer mais de l'image de l'immeuble ordonnancé (cours dessin).

4 - Transposition et émergence de modèles : fin XIXè s.

C'est la confirmation de l'appartenance de l'architecture domestique à l'Architecture. De nouveaux besoins de confort, des exigences d'hygiène (air, eau, lumière, chaleur) apparaissent. Les traités architecturaux (Daly, Ramée, Viollet-le-Duc) sont des traités de savoir vivre. Le modèle est la riche demeure, même si le domaine d'application est l'immeuble de loyer.

Comme au siècle précédent, on a une séparation partie privée / publique / pièces de services, mais on voit une
augmentation du nombre de chambres (de taille différentes) et une diminution des espaces de représentation. l'usage du cabinet de toilette n'est pas encore régulièrement établi. (L'espace urbain également est repensé en terme de salubrité, pensons aux prefets Poubelle ou Haussman..).

La différentiation horizontale des immeubles est fonction des quartiers, ce qui est nouveau. (la notion de banlieue apparaît). Avec l'invention de l'ascenceur, le rapport étage noble en bas / étage haut en haut va s'inverser (en haut, il y a plus de lumière et moins de bruit ...).

(Ce livre s'arretant à cette époque, je me permets, en "5", un petit résumé personnel du XXè siècle 🙂

5 - XXe siècle

Au début du XXè siècle, avec l'Art Nouveau, le modèle prédominant est celui de la villa, avec l'affirmation sur la façade des principes de distribution intérieure (beaucoup de petites pièces très spécialisées).

Principalement entre les deux guerres mondiales, le mouvement moderne (et les nouvelles techniques acier et béton armé), en chef de file Le Corbusier, instaure le "plan libre" : la façade n'est plus structurellement porteuse, elle peut donc être toute vitrée et le cloisonnement intérieur n'a plus d'autres contraintes que la seule
distribution. Avec la disparition de la domesticité, il ne subsiste qu'une séparation espace public / espace privé qui correspond à la séparation jour / nuit.

La fin du XXè voit s'amorcer deux tendances :
- l'hypertrophie croissante des espaces privés, avec l'émergence "d'appartements" pour les grands enfants (ceux-ci aspirant à une certaine autonomie tout en s'incrustant dans le nid familial) à coté de la "suite parentale" (chambre, dressing, salle bains, de sport...) ,
- La polyvalence et la simplification de l'espace jour, la réception et la préparation (salon / salle à manger / cuisine) étant de moins en moins séparés, sous l'influence entre autres du phénomène "loft", qui peut apparaître comme un retour vers un modèle rural.

Voilà, j'espère que ce "topo" ne vous a pas trop barbé. J'estime quand à moi avoir une bien meilleure visualisation des contextes et des situations décrites dans la littérature du XVIIè, XVIIIè et XIXè s. depuis que je sais tout ça !
La période étudiée commence au moyen-âge, et il n'y a pas d'habitations plus anciennes qui soient encore debout. Donc chacun pourra dater le modèle de son chez-soi 😉 ... ou de ses goûts !

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Margaux

Spécialiste des arts et loisirs, je partage avec vous mes cours sur ces différentes thématiques !