Depuis une trentaine d’années, il y a un renouveau du contrat. Dans quelle mesure ce renouveau contractuel pose des problèmes juridiques ? On a parlé de contractualisation des politiques publiques. Cette contractualisation poursuit quatre types d’objectifs.

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Le contrat comme nouveau mode d’intervention économique et sociale

On est passé de l’économie dirigée à l’économie régulée qui fait appel à de nouveaux instruments juridiques qui sont organisés autour d’autorités administratives indépendantes.

L’organisation du système économique a connu une phase transitoire : l’économie contractuelle.

Elle a été inaugurée en matière agricole via la loi du 6 juillet 1964 qui prévoyait que les niveaux de production et les niveaux de prix seraient arrêtés par accord interprofessionnels entre groupement d’acheteurs et organisation de production. C’était sur la base de ces accords interprofessionnels que les prix étaient arrêtés par arrêté ministériel. Toujours en matière agricole, il existait un Fonds d’Organisation des Marchés Agricoles (FOMA) dont précisément les instruments pour réguler les niveaux de production consistaient à acheter sur les marchés agricoles, à revendre lorsque les prix étaient à nouveau stabilisés. La politique des prix a aussi donné lieu à des pratiques négociées. Les organisations de producteurs et de distributeurs négociaient dans le cadre d’accords interprofessionnels qui étaient ensuite homologués par le ministre de l’économie.

Le contrat s’est développé dans le cadre de la politique d’aide des collectivités territoriales, de l’Etat aux entreprises privées.

Généralement, l’attribution d’une aide publique est discrétionnaire.

La loi n’encadre pas l’aide aux entreprises par les collectivités publiques. Dans ce cadre où le pouvoir discrétionnaire domine, l’habitude a été prise de conclure des contrats qui sont subordonnés à la réalisation d’objectifs. Les textes multiplient les aides qui sont subordonnées à la signature d’une convention.

 Le contrat s’est développé ans le cadre de la politique des maîtrise de dépense de santé.

Le plan Juppé du 24 avril 1996 prévoyait un conventionnement en cascade. L’Etat contractualise avec les caisses nationales de Sécu. Ces dernières contractualisent avec les caisses locales. Parallèlement, les caisses de Sécu concluent des accords avec les syndicats de médecins pour arrêter le niveau des honoraires.

Ce processus de conventionnement se retrouve dans l’Etat et les universités.

Cela conditionne le financement de l’Etat à la réalisation d’un certain nombre d’objectifs.

Le contrat comme prolongement de la décentralisation

La décentralisation consiste à transférer des pouvoirs de décisions à des autorités locales élues.

On assiste à une multiplication des centres de décision ce qui pose le problème de l’harmonisation des décisions publiques.

De facto, le contrat s’est imposé comme la technique la plus efficace pour assurer l’harmonisation des politiques conduites par les différents acteurs publics.

Les conventions entre partenaires Public/Privé.
Ce mouvement de contractualisation a été lancé dès les lois de 1983 portant sur les transferts de compétences.
Le législateur a prévu qu’en cas de transfert de compétences, l’Etat et les collectivités territoriales pourront conclure des conventions pour organiser les transferts de services ou de biens. Plus largement, on retrouve des dispositions qui prévoient que pour mettre en œuvre une compétence, on peut mettre en œuvre une convention. Le législateur incite, en même temps qu’il décentralise, à recourir à la contractualisation. Depuis 30 ans, cette tendance ne s’est jamais démentie .

  • La réforme de 2010 qui met en place les métropoles prévoit que ces dernières pourront conventionner avec les régions et départements pour exercer leurs compétences.
  • Cette tendance a même reçu l’accord du Conseil constitutionnel.

DC DU 17 JUILLET 1983 qui portait sur la conclusion d’une convention fiscale entre l’Etat et la Nouvelle Calédonie : Cette loi prévoit une convention entre l’Etat et la Nouvelle Calédonie et vise à répartir les compétences fiscales et les prélèvements fiscaux. Le CC est saisi et a estimé qu’aucun principe ou aucune règle de valeur constitutionnelle ne faisait obstacle à ce que l’Etat utilise le contrat pour régir ses relations avec les CT. Parallèlement à la décentralisation, le gouvernement de 1982 a cherché à relancer la planification. Cette dernière passe par un instrument qui est le contrat de plan Etat-Région.

Le contrat comme instrument de modernisation interne des services de l’Etat

En l’espèce, ce qui nous intéresse se sont les relations entre l’administration centrale et les services déconcentrés. Dans le cadre de la réforme de l’Etat, le contrat, qui est utilisé à l’intérieur même des services, va se substituer aux relations traditionnelles pour appliquer les méthodes de New Management Public. Cette évolution est marquante à partir des années 1990. Deux circulaires :

  • Circulaire Rocard de 1989 sur les centres de responsabilité
  • Circulaire Juppé de 1995 sur les contrats de services

L’objet de ces circulaires est de mettre en place des projets de services où les agents sont associés à la détermination des objectifs. Cela passe par des contrats entre le ministère et le service. Ce contrat doit donner une plus grande liberté de gestion aux agents.

En contrepartie, on leur fixe des objectifs d’amélioration du service en matière budgétaire, en matière qualitative qu’ils ont à tenir.

La question qui s’est posée est de savoir si on pouvait parler de contrat :

  • La réaction des juristes est de dire que c’est une aberration car le contrat suppose deux volontés distinctes.

Or, en l’espèce, il n’y a qu’une seule personne juridique : l’Etat. En outre, si on adopte le point de vue publiciste, les relations entre l’administration et ses agents sont des relations verticales, hiérarchiques. Il n’y a pas de place pour le contrat dans ce type de relation.

  • La position de la doctrine est de se demander quel est ce type d’acte.

Certains auteurs dont Alain Serge Mescheriakoff, dans son article Ordre intérieur administratif et contrat, paru à la RFDA en 1997, postulent qu’il existe une sorte d’ordre intérieur contractuel. Si on considère que cela se passe à l’intérieur de l’Etat, le qualificatif de contrat est fondé car ces contrats sont conclus par des acteurs institutionnels différents (il y a bien une altérité) et ces documents dictent des comportements à suivre (ce sont des objectifs qui, s’ils ne sont pas remplis, donnent lieu à des sanctions positives).

Le contrat, instrument d’un nouveau partenariat public/privé

La décentralisation, la crise des finances publiques font que les collectivités publiques sont :

  • à la recherche d’autres modes de financement
  • à la recherche de nouveaux partenaires pour mettre en œuvre les compétences qui leurs sont dévolues par la loi

S’est développée une ingénierie contractuelle :

  • le droit des montages contractuels complexes
  • le développement de la délégation de service public
  • le recours systématique au marché public pour externaliser un certain nombre de mission

            On est dans une ambiance de libre concurrence, de néolibéralisme qui consiste à penser qu’une entreprise privée est mieux gérée qu’une administration publique.

Le développement de la contractualisation source de confusion juridique

Cette confusion se concrétise de plusieurs manières :

  • il arrive que le JA traite les actes en cause, dont le contenu a été formellement négocié, comme de véritables actes unilatéraux : ce qui importe, c’est l’autorité qui l’homologue (la dimension contractuelle de ces actes est juridiquement niée)
  • dans d’autres cas, la jP a du mal à déterminer clairement la portée de ces actes de forme contractuelle

Les contrats économiques, une qualification juridique en trompe l’œil

  • Il y a d’abord un artifice. En effet, le recours au ctt ne modifie pas la réalité de la relation institutionnelle entre les acteurs.

Le ctt sert à masquer une relation juridique qui reste unilatérale (notamment quand l’Etat est à la manœuvre, le point de vue de l’Etat finit par l’emporter). On parle d’instrumentalisation des CT par l’Etat.

  • D’un point de vue cttx, on s’aperçoit que le JA a eu tendance à requalifier des procédures en apparence contractuelles.

Il insiste essentiellement sur leur dimension unilatérale. C’est le cas des accords sur les prix. CE 1974 VALLET où le CE a estimé que, de cet ensemble complexe, il ne fallait retenir qu’un élément à savoir l’arrêté par lequel le ministre approuve les accords de prix.

  • Dans certains cas, c’est la loi qui organise un conventionnement mais qui prévoit que le résultat des négociations devra être approuvé par un arrêté ministériel.

Dans ce cas-là, le CE a jugé qu’il fallait voir dans le résultat de ces négociations non pas un ctt mais une décision unilatérale à caractère réglementaire prise en accord avec les organisations syndicales. L’existence d’une négociation est purement et simplement niée par le CE qui en fait une phase préparatoire, ensuite incorporée par l’arrêté. CE 1997 SYNDICAT DES MÉDECINS D’AIX (en matière de droit de la sécurité sociale) : il a jugé, à propos des conventions conclues entre les caisses nationales de Sécu et les syndicats de médecins, que l’arrêté ministériel qui approuvait les conventions donnait une portée juridique à ces conventions et leur conférait les effets juridiques d’un acte réglementaire. Dans tous les cas, ce positionnement tend à résoudre une difficulté : ces conventions sont susceptibles d’intéresser les tiers. Le fait de ne retenir que l’acte unilatéral qui vient ratifier la convention permet d’ouvrir le REP contre ces conventions.

  • Dans ces nouveaux modes d’action publique, le recours au ctt n’est qu’une forme de paravent et le fond de l’affaire reste contractuel. On peut citer la manière dont l’Etat a géré l’opération « Université de Lille ». L’Etat a investi dans ce projet avec les régions, mais a décidé du financement. Les régions devaient financer le développement des universités.
  • Cette contractualisation dont les effets juridiques sont ambigus n’est pas non plus toujours un instrument très efficace. On peut prendre un exemple dénoncé à longueur de rapport par la Cour des comptes, c’est la politique des aides publiques aux etps. Par cette politique de contractualisation, elle a montré que s’est développé une répartition des compétences parallèle à la répartition prévue par la loi. On ne sait pas qui intervient et comment pour mettre en œuvre des systèmes d’aides publiques.
  • Le dernier pb posé par la contractualisation, c’est que l’Etat devient partenaire des CT sur des projets qu’ils portent en commun. Du coup, il perd de vue sa mission à l’égard des CT à savoir de vérifier la manière dont ces dernières appliquent la loi et d’exercer sur elles une tutelle. L’Etat ne l’exerce plus car sur de nombreuses opérations, au lieu d’être au-dessus, l’Etat œuvre comme partenaire (malgré l’article 72 de la C°). Au lieu de contrôler, l’Etat couvre.

Les contrats d’objectif ou de programme, un objet juridique mal identifié

            L’apparition de ces contrats est liée aux transformations de la régulation juridique.

Il n’y a pas un secteur aujourd’hui de l’action publique qui échappe à cette pratique des programmes.

Si on observe les lois qui sont censées servir de cadre à la mise en œuvre d’une politique publique, les normes sont formulées sous la forme d’objectifs à atteindre. La manière d’atteindre ces objectifs est ensuite d’essayer d’amener les différents partenaires, publics ou privés, à mener des actions. Ces actions sont organisées par le biais de ctts de programme ou d’objectifs qui déclinent la manière dont on va s’y prendre pour atteindre les objectifs fixés par le législateur. Exemple : notion de plan Etat/région, pivot de la politique d’aménagement du territoire Cependant le problème, c’est que ce ctt n’a que l’apparence de la juridicité parce que peuvent être véhiculés ici toutes sortes d’engagement, plus ou moins contraignants, qui peuvent parfois relever davantage de la déclaration d’intention que de l’engagement synallagmatique. D’autant que pour ce qui est de la planification à la française, le plan n’est pas un document obligatoire.  Que penser du caractère obligatoire de ces cttx de plan ? Il y a eu un feuilleton cttx devant le CE :

  • CE 8 JANVIER 1988 MINISTRE CHARGÉ DU PLAN C. CU DE STRASBOURG

Faits : il s’agit d’une décision du gouvernement français qui installe en Isère, à Grenoble, un accélérateur de particules. Le problème, c’est que dans le ctt de plan, il était prévu que cet équipement serait installé à Strasbourg. La CU de Strasbourg et la région Alsace décident d’attaquer la décision du gouvernement.

CE : le ctt de plan est un engagement synallagmatique, porteur d’obligations réciproques. Leur non respect est susceptible d’engager la R de l’Etat sauf que le recours porté par la région est un REP contre la décision du gouvernement. Or le ctt n’est pas une source de légalité juridique. On ne peut pas en demander l’annulation. La CUS est irrecevable à demander l’annulation d’une décision prise en contradiction avec un ctt de plan.

  • CE 25 OCT 1996 ASSO ESTUAIRE ÉCOLOGIE

Faits : REP formé par une asso de défense de l’environnement contre la décision du préfet de signer le contrat de plan, lequel prévoyait que le port de Saint-Nazaire allait être étendu et englober une zone naturelle et protégée.

CE : il juge le recours irrecevable sauf qu’ici on est pas dans le même cttx (décision de signer le ctt de plan, c’est différent de 1988). Cette décision est attaquée parce qu’elle contrarie des lois sur l’environnement. Il explique qu’il n’y a pas de décision dans le ctt de plan. Le ctt n’emporte pas par lui-même de conséquences directes quant à la réalisation des mesures qu’il prévoit.

Cette affaire est légèrement dérangeante parce que le CE dit que le ctt de plan ne fait pas grief. Ça veut simplement dire que le ctt de plan est une mesure préparatoire à des décisions administratives à venir ?

  • Mais en 1999, le CE a eu une approche différente à propos non pas d’un ctt de plan Etat/région mais Etat/La Poste.

Il prévoyait que l’Etat allait financer les missions de SP de cet EP. Dans cette affaire, une fédération syndicale attaquait la décision de signer ce ctt. Le CE va admettre le recours en faisant valoir deux éléments :

  • Le ctt de plan a une portée purement contractuelle
  • Pourtant, le syndicat est recevable à attaquer la décision de signer ce ctt parce qu’un certain nombre des stipulations sont susceptibles de porter atteinte aux droits que les agents tiennent de leur statut

Que faut-il en conclure ? La réponse a été donnée par CE 21 DÉCEMBRE 2007 AFFAIRE RÉGION DU LIMOUSIN.

Faits : l’Etat était attaqué au plein cttx par la région du Limousin au motif qu’il n’avait pas respecté les engagements inscrits au ctt de plan. L’Etat avait prévu la réalisation d’une ligne TGV. Est-ce vraiment utile ? Il s’est finalement ravisé. Plutôt que de réalisation une ligne traversant le massif central, il décide de réhabiliter l’ancienne ligne. Cette décision de l’Etat est contestée par la région qui avait déjà engagé des dépenses pour le premier projet. Elle demande indemnisation.

Solution : L’Etat a été condamné. Le CE rappelle la jP de 1988. De plus, l’arrêt fait la distinction entre deux types de clauses dans ces cttx :

  • Celles qui correspondent à de véritables engagements contractuels
  • Celles qui ne sont que de simples déclarations d’intention

Cette jP a d’ailleurs été confirmée. CE 2008 MINISTRE DE L’ÉCOLOGIE où l’Etat a été à nouveau condamné pour non respect d’un engagement inscrit dans un ctt de plan. Les contrats de plan ont une portée juridique. La R de l’Etat peut être engagée. Dans l’affaire de 2007, le CE justifie l’engagement de la R de l’Etat en expliquant que :

  • l’Etat a le droit de modifier/résilier unilatéralement les clauses d’un contrat
  • mais s’il le fait, il doit réparer les conséquences dommageables de cette résiliation (cf. CE 1910 CIE GÉNÉRALE DES TRAMWAYS)

Le CE le confirme en 2008 dans son rapport public consacré aux contrats, nouveaux modes d’action publique. Il rappelle qu’il serait incongru de considérer que l’Etat puisse se soustraire à des engagements conclus avec des CT. Ici, les pps de la liberté contractuelle et de la libre administration reconnus aux CT fondent leur droit à réparation. Parachèvement du processus de juridicisation entre l’Etat et les CT.

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Simon

Juriste et ancien élève de l'UPPA et de la Sorbonne, je mets à dispositions mes TD, notes et fiches de cours pour aider les étudiants. N'hésitez à poser vos questions en commentaire : On essaiera de vous aider en faisant de notre mieux !