Que pensez vous de l’assertion suivante de Condorcet : ‘’ Mandataire du peuple, je ferai ce que je croirai le plus conforme à ses intérêts. Il m’a envoyé pour exposer mes idées, non les siennes’’ ?

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C'est parti

INTRODUCTION : Où réside la souveraineté ?

« Il y a deux vérités qu'il ne faut jamais séparer en ce monde : la première est que la souveraineté réside dans le peuple, la seconde est que le peuple ne doit jamais l'exercer ». (Rivarol, Extrait d’un Journal politique national). Le mandataire, est la personne à qui est conféré un mandat.

Le mandataire du peuple selon la formulation de Condorcet est le représentant de la nation suite à des élections dont la nature peut dépendre.

Il est donc ici question d’un mandat représentatif qui s’oppose au mandat impératif impliquant une souveraineté populaire défendue par Rousseau mais difficilement applicable en pratique. La finalité du mandat représentatif revient surtout à détacher les représentants des électeurs, le mandataire n’est pas le représentant de sa circonscription ou de ses électeurs mais de la nation toute entière en tant que corps unifié.

Suffrage universel et souverainté nationale : quels liens ?
Il est alors tout à fait possible que le mandataire œuvre dans l’intérêt du peuple tout en étant en conflit avec les idées du peuple.
Dans la théorie du régime représentatif, la souveraineté c’est l’attribut d’un être, nation ou peuple qui fonde l’autorité des organes suprêmes de l’Etat. En effet, ces organes ne sont soumis au contrôle d’aucuns autres organes et ils sont investis des compétences les plus élevés. En matière de politique, la souveraineté est le droit absolu d'exercer une autorité (législative, judiciaire et/ou exécutive) sur une région, un pays ou sur un peuple. La souveraineté revêt des significations historiques, mais aussi contemporaines. Le premier a avoir défini le concept de souveraineté est Jean Bodin (1529-1596), selon lui, elle est ‘la puissance de donner ou de casser la loi’.  Et, dès le XVIIIème siècle, la remise en cause du la souveraineté divine va conduire à l’établissement d’une souveraineté collective dont la démarche revient à permettre l’exercice d’un pouvoir immanent sur lequel deux théories se fondent : celle de la souveraineté nationale et celle de la souveraineté populaire. Mais plus récemment et notamment sous l’impulsion du juriste allemand Georg Jelinek ont observe que la souveraineté n’est pas inhérente à l’état. La souveraineté, qu’elle réside dans le peuple ou dans la nation connait aujourd’hui une problématique renouvelée avec le renforcement de la construction communautaire. La paternité de la théorie de la souveraineté populaire revient à Jean Jacques Rousseau, dans sa théorie, le pouvoir appartient peuple. Selon lui chacun des individus formant le corps social est détenteur d’une parcelle de souveraineté. Le souverain est donc l’expression de la volonté générale. Le peuple doit exercer à la fois le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. A coté de cette théorie, la théorie de la souveraineté nationale développée par Sieyès et Montesquieu se relève beaucoup moins favorable au peuple en entrainant des conséquences juridiques différentes.

En effet, dans le cadre de cette seconde théorie, le peuple est frappé d’incapacité et des représentants décident à sa place.

Selon cette conception nationale de la souveraineté, le représentant n’est pas le reflet de la nation, il en est la tête. La volonté du représentant n’est pas la traduction fidèle de la volonté effective des électeurs. Les représentants ne sont pas des mandataires inféodés au peuple. Condorcet (1743-1794), philosophe (rédacteur de l’Encyclopédie) confirme cette exigence dans son assertion après son élection à la constituante de 1791.

Les élus doivent-ils respecter leurs promesses électorales ?
Une élection censitaire l’avait alors investie, il insiste ici, sur l’indépendance absolue de ses opinions.

Comment est-il alors possible de concilier, de partager la souveraineté du peuple et la souveraineté nationale ?

Populaire et nationale, la souveraineté demeure en droit partagée (I), ce partage est consacré par la Constitution de 1958 (A/) mais il apparait inégal dans la pratique courante (B/). De même, l’exercice de la souveraineté sous la Vème République (II) fait naitre un régime semi-présidentiel (A/) et elle se décline dans une double citoyenneté suite au traité de Maastricht

I/ Populaire et nationale, la souveraineté demeure en droit partagée

Les principes de souveraineté nationale et de souveraineté populaire ne sont pas toujours exclusifs l’un de l’autre. L’article 3 de la constitution du 4 octobre 1958 dispose ainsi que "la Souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum". L’article 27 dispose pour sa part que "tout mandat impératif est nul". En faisant coexister un régime représentatif avec des procédures de démocratie directe, la Ve République mêle donc les deux notions. Mais la démocratie directe, en dehors des périodes électorales semble s’éteindre, la pratique courante montre le désaccord croissant entre représentés et représentants.

A/ Partage consacré par la Constitution de 1958

En droit, c'est la Constitution qui définit comment s'exerce la souveraineté, quelles sont les institutions qui détiennent le pouvoir et comment elles sont contrôlées. Dans la Constitution du 4 octobre 1958, les constituants n’ont pas souhaité expressément consacrer une conception de la souveraineté plutôt qu’une autre. Mais la souveraineté nationale est demeurée le principe cardinal. On retrouve cette volonté de consensus à l’article 3 où il est indiqué que : ‘le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité n’en émane expressément’ et à l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : ‘ la loi est l’expression de la volonté générale ; tous les citoyens ont le droit de concourir personnellement ou par ses représentant à sa formation ‘. L’article 3 alinéa 2 de la Constitution de 1958 tire la conclusion suivante : ‘ Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice’. L’exercice de la souveraineté n’est donc attribué ni à un individu, ni à une section du peuple et non à ses représentants. Lorsque ceux agissent en son nom, c’est toujours le peuple qui exerce la souveraineté, la démocratie pouvant être à la fois directe et représentative. Cette conception s’oppose ainsi à une organisation fédérale de l’État, qui reconnaît la coexistence de plusieurs États souverains. De même, la Constitution de 1958 pose le principe de la République comme étant : ‘ le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ‘ (article 2). Le peuple est alors présenté comme le véritable moteur de la souveraineté.

Le vote est l’expression de la Souveraineté.

La constitution prévoit que « le suffrage peut être direct ou indirect » et qu’il est « toujours universel, égal et secret » (art. 3). Ces principes font du peuple la seule source du pouvoir. Exercé en son nom, ce principe n’a de légitimité que parce qu’il résulte de sa volonté exprimée dans le cadre du suffrage universel. Les différents pouvoirs définis par la constitution dérivent de la souveraineté détenue par le peuple constitué en un corps politique, la Nation.

Le peuple transfère sa souverainté pour le vote.
Le président de la République et l’Assemblée nationale apparaissent comme les dépositaires de cette Souveraineté nationale, puisqu’ils sont tous deux élus au suffrage universel direct.
Le peuple peut par ailleurs exprimer directement sa volonté dans le cadre des référendums, qui peuvent porter sur certains projets de loi ou sur les révisions constitutionnelles. Mais l’entité abstraite qu’est le peuple est souvent difficile à consulter. En effet, malgré l’évolution des techniques et l’élévation générale du niveau de connaissance, il semble complexe de consulter l’ensemble du corps électoral sur des sujets épineux et cela à plusieurs moments de l’année. C’est pour cela que la souveraineté nationale a tendance à prévaloir sur la souveraineté populaire.

B/ Un partage inégal dans la pratique courante

Cette primauté de la souveraineté nationale prend racine dans l’observation des défauts de la théorie de Rousseau. Montesquieu affirmait dans son ouvrage De l’esprit des lois que :

‘ le grand avantage des représentants, c’est qu’ils sont capable de discuter des affaires.

Le peuple n’y est point du tout propre, ce qui forme un des grands inconvénients de la démocratie.’ Le principe d’unanimité de la volonté générale de Rousseau est inconcevable du seul fait de la divergence des intérêts particuliers. Le mandataire est alors le représentant de la nation tout entière. Il ne défend pas des intérêts divers mais il défend l’intérêt de la nation. Il n’est plus soumis au mandat impératif qui le soumettait à une situation d’étroite dépendance avec le peuple. De même, il peut s’opposer à la volonté de ses électeurs dans le cadre par exemple d’une mesure de taxation qui n’aura pas d’effet direct sur les électeurs.

Ici, la souveraineté appartient à la nation, une entité abstraite et indivisible.

Cet ensemble est fictif puisqu'il ne se limite pas aux seuls citoyens présents, mais inclut les citoyens passés et futurs. Dans cette conception de la souveraineté nationale, les représentants expriment les volontés de la nation, qui va mettre en place des institutions politiques (elles sont prévues par la Constitution). La souveraineté ainsi dégagée est indivisible (CAD qu’elle est entièrement déléguée aux Assemblées parlementaires), indivisible (CAD que la délégation de pouvoir au parlement à une durée limitée) et imprescriptible (CAD que la nation peut se ressaisir de la souveraineté au moment où elle le juge utile). On peut aussi émettre l’idée que la souveraineté nationale entraine une exclusion de la démocratie directe et que le suffrage populaire est réduit à une fonction d’élections d’un corps de représentant de la nation. Dans ce cas là, la souveraineté nationale s’oppose à la souveraineté populaire. Dans le référendum qui consiste à l’approbation ou au rejet d’une proposition par les citoyens, on peut noter que la réponse du peuple ne prévaut pas toujours face aux choix des gouvernements. En effet, les français avaient reçus négativement la proposition relative à la ratification du traité de Lisbonne lors du référendum de 2005. Mais, les parlementaires (les représentants) réunis au Congrès (à Versailles) ont donné leur feu vert à la ratification du traité de Lisbonne en révisant la Constitution de la Ve République le 4 février 2008. Ce recours à la voie parlementaire pour ratifier un texte refusé par les citoyens dénote le partage inégal entre souveraineté populaire et souveraineté nationale. Ce mode de ratification montre aussi la monté en puissance du régime présidentiel sous la Vème République, et il illustre le renforcement communautaire de l’Union Européenne.

II/ L’exercice de la souveraineté sous la Vème République

En France dès la présidence de De Gaulle, on observe un renforcement du régime présidentiel. Le pouvoir se concentre de plus en plus dans les mains d’un seul homme, les domaines réservés du président s’élargissent mais doivent s’accorder dans le respect d’une autorité supranationale, l’UE.

 A/ Naissance d’un régime ‘semi-présidentiel’

Le changement qui s’opère est à la faveur de la souveraineté nationale, en effet l’instabilité parlementaire d’avant 1958 tend à redonner du pouvoir à l’exécutif et à ses représentants.

En qui réside la souveraineté nationale ?
La fonction présidentielle et l'autorité du gouvernement sont renforcées. Le président de la République, chef de l'État et des armées, devient la clé de voûte des institutions.
Le rôle de l'Assemblée nationale qui n'est plus permanente ni maîtresse de son ordre du jour, est redéfini de façon limitative. Elle doit partager l'initiative des lois avec le gouvernement. Confronté à une majorité réticente ou incertaine, ce dernier peut recourir à l'article 49-3 par lequel un texte de loi est considéré comme étant approuvé sauf à s'y opposer par le vote d'une motion de censure. Au regard de l'histoire constitutionnelle française, le statut du parlement sous la Vème République semble avoir muté. Il avait dans la ‘Constitution Grévy’ un rôle central dans l’organisation des pouvoirs. Mais après 1958, il semble que ‘ la volonté de restaurer l’état’ (G.Burdeau) influa négativement sur le rôle du parlement. Est alors remise en cause l’utilité du parlement qui est une instance démocratique de représentation nationale. De même, ce renforcement du pouvoir exécutif, devient le ressort d’un seul homme, le président. Aujourd’hui, on constate la diversification des implications du chef de l’état. La vie politique française se situerait ainsi à mi-chemin entre la pratique traditionnelle de la Ve République et le nouveau régime présidentiel. Cela se traduit aussi par un amenuisement du rôle du premier ministre et une personnalisation du pouvoir dans le chef de l’état.

L’exécutif, avec à sa tête le chef de l’état, devient le chef d’orchestre du législatif.

Lorsqu’une majorité est acquise à l’assemblé, le gouvernent bénéficie d’une large liberté et met œuvre dans la mesure du possible les réformes qu’il désire. Cela remet en cause la représentation nationale (la souveraineté populaire), la primauté de la majorité élue diminue le pouvoir d’action de l’opposition et des parties minoritaires. Dans ce cas là, seule une partie de la population, majeure soit elle obtiendra une certaine satisfaction de ses vœux émise à travers son vote. Un fait nouveau apparait aussi depuis la seconde moitié du XXème siècle, c’est la construction communautaire qui devient de plus en plus aboutie. Aujourd’hui et depuis le traité de Maastricht, la souveraineté nationale et populaire connaissent de nouvelles problématiques.

B/ Une double citoyenneté suite au traité de Maastricht

Est citoyen de l’Union toute personne ayant la nationalité d’un État membre ‘.

Instituée par le traité de Maastricht en 1992 et complétée par le traité d’Amsterdam en 1997, la citoyenneté de l’Union complète mais ne remplace pas la citoyenneté nationale. Elle constitue un lien entre les citoyens et l’UE destiné à favoriser l’identification des citoyens à l’UE et le développement d’une opinion publique et d’une identité européenne. L'Union européenne est un espace géographique prenant la forme singulière d'un compromis entre intégration supra étatique et souveraineté des États. Ainsi son fonctionnement est tantôt communautaire, tantôt intergouvernemental. Elle n'est donc ni une fédération, ni une confédération mais réalise le paradoxe d'une intégration d'États souverains. Si la France perd une partie de sa souveraineté en abandonnant à l'Union européenne sa politique agricole ou sa politique monétaire, elle a longtemps influencé le débat à l'intérieur de l'Union européenne, et fait de l'Europe la porte-parole de ces intérêts à l'extérieur de l'Union Au niveau de la souveraineté du peuple, les nationaux de l’UE jouissent donc de nouvelles qualités juridiques.

Ils élisent les membres du parlement européen qui les représentent.
Mais depuis quelques années on voit se développer un ’ europessisme’ qui se traduit par un fort absentéisme lors des élections européennes. L’UE perd en conséquent une certaine légitimité du fait de impopularité. Elle reste plus une ambition politique que populaire, ses enjeux dépassent une grande partie de la population. En cela, on retrouve l’exigence de Condorcet qui évoque son indépendance d’opinion. lui comme de nombreux représentants se détachent du peuple dans leur ambition politique avec l’idée qu’ils sont les plus aptes à prendre les bonnes décisions. Cependant il parait clair que l’UE ne fait pas le consensus espérait par de nombreux représentants européen. Au niveau constitutionnel, le traité de Maastricht du 7 février 1992, puis le traité d’Amsterdam du 2 octobre 1997, enfin le traité constitutionnel européen du 18 juin 2004, repris en partie par le traité de Lisbonne du 13 décembre 2007, ont successivement provoqué des transferts de compétences et leur corpus ont entrainé des révisions constitutionnelles. Ce transfert de compétence concerne la souveraineté nationale mais aussi la souveraineté populaire. Il a été donné aux français une souveraineté à deux niveaux. On constate en effet que le gouvernement à un rôle prépondérant dans l'élaboration des lois. La théorie de Rousseau impliquait un mandat impératif qui établissait un lien étroit entre le mandataire et le mandant. Mais la Constitution de 1958 insiste sur le fait que ‘ tout mandat impératif est nul ‘.

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Simon

Juriste et ancien élève de l'UPPA et de la Sorbonne, je mets à dispositions mes TD, notes et fiches de cours pour aider les étudiants. N'hésitez à poser vos questions en commentaire : On essaiera de vous aider en faisant de notre mieux !