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C'est parti

Excipit du Père Goriot, Honoré de Balzac, 1835 : un commentaire composé

L’extrait étudié :

Les deux prêtres, l'enfant de choeur et le bedeau vinrent et donnèrent tout ce qu'on peut avoir pour soixante-dix francs dans une époque où la religion n'est pas assez riche pour prier gratis. Les gens du clergé chantèrent un psaume, le Libera, le De profundis. Le service dura vingt minutes. Il n'y avait qu'une seule voiture de deuil pour un prêtre et un enfant de choeur, qui consentirent à recevoir avec eux Eugène et Christophe.

- Il n'y a point de suite, dit le prêtre, nous pourrons aller vite, afin de ne pas nous attarder, il est cinq heures et demie.

Cependant, au moment où le corps fut placé dans le corbillard, deux voitures armoriées, mais vides, celle du comte de Restaud et celle du baron de Nucingen, se présentèrent et suivirent le convoi jusqu'au Père-Lachaise. A six heures, le corps du père Goriot fut descendu dans sa fosse, autour de laquelle étaient les gens de ses filles, qui disparurent avec le clergé aussitôt que fut dite la courte prière due au bonhomme pour l'argent de l'étudiant. Quand les deux fossoyeurs eurent jeté quelques pelletées de terre sur la bière pour la cacher, ils se relevèrent, et l'un d'eux, s'adressant à Rastignac, lui demanda leur pourboire. Eugène fouilla dans sa poche et n'y trouva rien, il fut forcé d'emprunter vingt sous à Christophe. Ce fait, si léger en lui-même, détermina chez Rastignac un accès d'horrible tristesse. Le jour tombait, un humide crépuscule agaçait les nerfs, il regarda la tombe et y ensevelit sa dernière larme de jeune homme, cette larme arrachée par les saintes émotions d'un coeur pur, une de ces larmes qui, de la terre où elles tombent, rejaillissent jusque dans les cieux. Il se croisa les bras, contempla les nuages, et, le voyant ainsi, Christophe le quitta.

Rastignac, resté seul, fit quelques pas vers le haut du cimetière et vit Paris tortueusement couché le long des deux rives de la Seine où commençaient à briller les lumières. Ses yeux s'attachèrent presque avidement entre la colonne de la place Vendôme et le dôme des Invalides, là où vivait ce beau monde dans lequel il avait voulu pénétrer. Il lança sur cette ruche bourdonnante un regard qui semblait par avance en pomper le miel, et dit ces mots grandioses: « À nous deux maintenant ! »

Et pour premier acte du défi qu'il portait à la Société, Rastignac alla dîner chez madame de Nucingen.
.

Le Père Goriot, Honoré de Balzac,  1835

Comment lire les écrits d'Honoré de Balzac ?
"Balzac, c’est vous, c’est moi. En Balzac, je m’instruis beaucoup, non pas dans le vocabulaire des idées, mais dans celui des choses" - Alain (philosophe) (source : France Culture)

Méthode du commentaire composé

On rappellera ici la méthode du commentaire composé vue en cours francais :

Partie du commentaireViséeInformations indispensablesÉcueils à éviter
Introduction- Présenter et situer le texte dans le roman
- Présenter le projet de lecture (= annonce de la problématique)
- Présenter le plan (généralement, deux axes)
- Renseignements brefs sur l'auteur
- Localisation du passage dans l'œuvre (début ? Milieu ? Fin ?)
- Problématique (En quoi… ? Dans quelle mesure… ?)
- Les axes de réflexions
- Ne pas problématiser
- Utiliser des formules trop lourdes pour la présentation de l'auteur
Développement - Expliquer le texte le plus exhaustivement possible
- Argumenter pour justifier ses interprétations (le commentaire composé est un texte argumentatif)
- Etude de la forme (champs lexicaux, figures de styles, etc.)
- Etude du fond (ne jamais perdre de vue le fond)
- Les transitions entre chaque idée/partie
- Construire le plan sur l'opposition fond/forme : chacune des parties doit impérativement contenir des deux
- Suivre le déroulement du texte, raconter l'histoire, paraphraser
- Ne pas commenter les citations utilisées
Conclusion- Dresser le bilan
- Exprimer clairement ses conclusions
- Elargir ses réflexions par une ouverture (lien avec une autre œuvre ? Événement historique ? etc.)
- Les conclusions de l'argumentation- Répéter simplement ce qui a précédé

Ici, nous détaillerons par l'italique les différents moments du développement, mais ils ne sont normalement pas à signaler. De même, il ne doit normalement pas figurer de tableaux dans votre commentaire composé. Les listes à puces sont également à éviter, tout spécialement pour l'annonce du plan.

En outre, votre commentaire ne doit pas être aussi long que celui ici, qui a pour objectif d'être exhaustif. Vous n'aurez jamais le temps d'écrire autant !

Le commentaire de l’extrait

Introduction

Le Père Goriot est un roman écrit par Honoré de Balzac en 1836, l’un des plus connus de son œuvre-fleuve de la Comédie humaineIl s’agit d’un ensemble de romans et de chroniques qui avait pour but de peindre la société du XIXème siècle, celle du capitalisme naissant.

Dans Le Père Goriot, Balzac présente pour la première fois le personnage récurrent de Rastignac, destiné à symboliser l’arriviste typique, prêt à tout pour réussir socialement. Mais dans ce roman d’introduction, il est encore neuf et se prendra plutôt d’affection pour le « Père Goriot », un copensionnaire de la pension dans laquelle lui-même a débarqué pour découvrir la capitale et ses promesses.

Ce vieil homme est délaissé par ses filles, qui ne s’intéressent qu’à son argent et le laisseront mourir seul. L’extrait qui nous occupe est justement celui de son enterrement, qui termine le roman.

Annonce de la problématique

Dès lors, comment cette scène fonde-t-elle les ambitions futures du jeune Rastignac ?

Annonce des axes

Nous analyserons dans un premier temps la situation dans laquelle le Père Goriot se fait enterrer. Puis nous montrerons qu’il s’agit également de la fin d’une étape pour Rastignac.

Développement

Un mort pauvre et seul

En lisant le récit de ces funérailles, il y a deux choses qui frappent d’abord : le mort qu’on enterre est seul et pauvre.

L’abandon du père

Le Père Goriot est un père, comme son surnom l’indique. Il a deux filles, et tout au long du roman, celles-ci se sont démarquées par leur ingratitude et leur désamour. L’enterrement n’occasionne aucune nouveauté.

En effet, l’abandon du Père se perçoit ici à travers plusieurs expressions :

  • « Il n'y avait qu'une seule voiture de deuil pour un prêtre et un enfant de choeur, qui consentirent à recevoir avec eux Eugène et Christophe. », avec l’expression de la négation « il n’y avait que … »
  • « deux voitures armoriées, mais vides », avec le mot « vides » qui symbolise la cérémonie toute entière, et qui veut dire aussi la noblesse du titre (puisque les voitures affiches les armoiries des nobles respectifs) couplée à l’absence de sentiments (puisque ces voitures sont vides)

Mais le plus remarquable, en matière d’absence, est sans aucun doute la phrase suivante :

A six heures, le corps du père Goriot fut descendu dans sa fosse, autour de laquelle étaient les gens de ses filles, qui disparurent avec le clergé aussitôt que fut dite la courte prière due au bonhomme pour l'argent de l'étudiant.

Celle-ci signifie que les filles du père ne sont pas venues assister à la cérémonie, qu’elles ont plutôt envoyé leurs « gens », c’est-à-dire leurs domestiques. En outre, le verbe « disparaître » insiste sur un second aspect, lié à celui mis en évidence : la rapidité avec laquelle tout se passe, au mépris du respect dû à un mort.

On trouve en effet un lexique temporel fourni qui manifeste la hâte d’en finir. Les interventions du clergé sont ainsi chronométrées (« Le service dura vingt minutes »), comme l’explicite le prêtre sans même chercher à se cacher :

- Il n'y a point de suite, dit le prêtre, nous pourrons aller vite, afin de ne pas nous attarder, il est cinq heures et demie.

Plus généralement, la cérémonie est racontée via la succession de faits, sans commentaire superflu, ce qui ajoute à l’impression de rapidité. On trouve naturellement une série de verbes au passé simple, qui figure l’enchaînement rapide des événements : « vinrent », « donnèrent », « chantèrent », « présentèrent », « suivirent », …

Comment définir le réalisme ?
Un enterrement à Ornans (1850), Paris, musée d'Orsay, Gustave Courbet

Dans cette perspective aussi, la phrase précédemment citée a quelque chose de remarquable :

A six heures, le corps du père Goriot fut descendu dans sa fosse, autour de laquelle étaient les gens de ses filles, qui disparurent avec le clergé aussitôt que fut dite la courte prière due au bonhomme pour l'argent de l'étudiant.

Outre les passés simples qui ont la valeur évoquée, la construction de la phrase paraît figurer une descente dans la fosse bâclée, escamotée. Et cette phrase, à l’instar des peu nombreux spectateurs, s’arrête davantage sur ce qui se passe autour du défunt que du défunt lui-même.

Transition

Le Père Goriot n’a personne, parce qu’il est pauvre ; la bonne société parisienne à laquelle appartiennent ses filles prouve ainsi sa cupidité et son intérêt par son absence.

La pauvreté du mort

Ce roman est un roman sur l’argent. Le Père Goriot était anciennement riche, mais il s’est ruiné à entretenir ses deux filles, qui ne lui en ont jamais rendu grâce - bien au contraire. La contrainte associée au manque d’argent fut donc dominante tout au long du roman et, encore à la fin, son absence est un levier décisif.

On peut d’abord relever le champ lexical qui s’y associe : « soixante-dix francs », « riche », « gratis », « pourboire », « vingt sous », …

Ce que symbolise cette scène, dans son ensemble, c’est que l’argent est une donnée omniprésente. Certes, sans lui, on ne peut rien avoir dans la vie ; mais dans la mort non plus.

Ainsi, on décèle toute l’ironie cynique du narrateur dans la première phrase de l’extrait :

[les deux prêtres] donnèrent tout ce qu'on peut avoir pour soixante-dix francs dans une époque où la religion n'est pas assez riche pour prier gratis.

Par là, il signifie que les prêtres sont comme des vendeurs, qui offrent un service à la mesure de ce que le client a payé. Il insiste même encore un peu plus loin sur cette relation de cause à effet :

aussitôt que fut dite la courte prière due au bonhomme pour l'argent de l'étudiant.

Comme si Rastignac fût allé au bordel, et eût obtenu une « passe » en conséquence.

Même les fossoyeurs, qui s’occupent de mettre la tombe sous terre, demandent à Rastignac un pourboire. Et malgré son montant ridicule de vingt sous, celui-ci ne peut l’avancer. Il doit donc emprunter, et cela l’embarrasse énormément :

Ce fait, si léger en lui-même, détermina chez Rastignac un accès d'horrible tristesse.

Transition

L’argent est donc source de tristesse, si l’on doit se fier à la réaction du jeune homme. Mais s’ensuivra plutôt une réaction d’orgueil, que la suite de l’extrait comme de la Comédie humaine le figurera : il faudra vaincre le monde par ses propres moyens.

Sur quelle dynamique fonctionne Le Père Goriot ?
Georges de La Tour : L'Argent versé (Réglement des comptes) , XIXème siècle

Le nouveau Rastignac

Cet extrait fait voir une construction notable. D’abord axé sur l’événement en tant que tel, avec tout ce qu’il a de déplorable et triste, il bascule ensuite sur Rastignac et ses nouvelles résolutions - qui semblent directement découler dudit événement. L’homme se fixe dès lors un nouvel objectif : conquérir Paris.

Du passé à l’avenir

Rastignac semble, nous l’avons remarqué, bouleversé par ces vingt sous qu’il n’a pas. Le narrateur utilise une antithèse pour souligner ce fait : c’est un fait « léger » qui provoque pourtant une « horrible » tristesse. C’est que lui-même prend conscience de sa pauvreté, dont le spectacle lui est offert par l’enterrement du père Goriot.

Or, dans le même temps, le jour tombe. C’est que cette scène est symbolique : le narrateur parle de « dernière larme de jeune homme », que Rastignac enterre en même temps que Goriot. Le jeune homme est mort, ses illusions avec ; et c’est l’adulte, plein d’ambitions, qui nait. Ces ambitions sont signifiés avec une métaphore :

Il se croisa les bras, contempla les nuages, et, le voyant ainsi, Christophe le quitta.

Il contemple les nuages, parce qu’il vise désormais les strates les plus hautes de la société. L’utilisation du passé simple marque en outre la rapidité du changement, comme une mort subite, et une renaissance instantanée : l’homme est décidé à devenir quelqu’un.

Transition

Ce qui figure et accueille en même temps le mieux ces ambitions nouvelles, c’est la ville de Paris.

Conquérir Paris

Paris devient ainsi l’objet de désir. L’avant-dernier paragraphe étaye cette métaphore -là :

  • Rastignac va en haut du cimetière pour contempler l’objet désiré, comme un roi son royaume
  • Paris est comparé à une femme étendue sur un lit, image iconique de l’amour : « Paris tortueusement couché le long des deux rives de la Seine »
  • la lumière qui vient de la ville agit comme une boussole, attire le regard du personnage comme elle le fascine : « où commençaient à briller les lumières »
  • le désir d’argent est associé à ce désir de conquête, puisque ses yeux s’attachent « presque avidement entre la colonne de la place Vendôme et le dôme des Invalides, là où vivait ce beau monde » ; on notera également l’utilisation de l’adverbe « avidement », qui suggère une impulsion vitale, presque carnassière
  • la métaphore de Paris comme un ruche et de ses richesses comme du miel présentent un Rastignac comme prédateur glouton, avide de se goinfrer ; le miel a également un aspect sensuel, qui renvoie à la comparaison de Paris et la femme

Finalement, toute son envie se concentre dans l’apostrophe finale à Paris, de nouveau personnifiée :

À nous deux maintenant !

C’est dire que Rastignac envisage la suite des événements comme un combat, où son talent et ses ressources seront mis à l’épreuve. Il y fait montre de sa confiance comme de sa prétention.

Quels sont les genres en vogue au XIXème siècle ?
Pierre Auguste Renoir a peint les grands boulevards de Paris (1875), lieux où se tiennent les pièces de théâtre les plus populaires

Surtout, Rastignac prouve son avidité par son action immédiate. Une fois le défi lancé à la capitale, on change de paragraphe et tout se résume en une dernière phrase :

Rastignac alla dîner chez madame de Nucingen.

Désormais, il n’est plus « Eugène » mais Rastignac ; son amante n’est plus « Delphine » mais « madame de Nucingen », du nom de son mari banquier. Aller dîner chez la fille du Père Goriot, c’est aussi accepter sa sécheresse de cœur, oublier ses propres larmes pour son ami défunt, pour que les ambitions de l’adulte vivent sur les désillusions de l’enfant.

Conclusion

En définitive, la fin du Père Goriot illustre bien tout ce qui lui a précédé : la solitude du vieil homme, l’ingratitude de ses filles, l’argent-roi.

Mais cette fin est aussi le début de quelque chose : le lecteur assiste en effet à la naissance de Rastignac, qui prend la suite d’Eugène. Conscient désormais de ce qu’il faut faire et, surtout, posséder, pour réussir dans le monde, il est prêt à mettre en action cet apprentissage.

Ouverture

On pourrait maintenant mener une étude comparative du comportement de Rastignac entre Le Père Goriot et Les illusions perdues. 

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Agathe

Professeur de langues dans le secondaire, je partage avec vous mes cours de linguistique !