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C'est parti

Présentation de l’œuvre

L’Etranger, paru en 1942, est le premier roman d’Albert Camus. Son incipit est l’un des plus connus dans la littérature moderne :

Aujourd’hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas.

C’est également le premier titre de la tétralogie (cycle de quatre œuvres) du « cycle de l’absurde », où l’auteur traite d'une vision absurde de l’existence. Les trois autres ouvrages du cycle sont l’essai Le Mythe de Sisyphe et les pièces de théâtre Caligula et Le Malentendu.

Il vient ainsi illustrer une phrase du Mythe de Sisyphe :

L’absurde naît de cette confrontation entre l’appel humain et le silence déraisonnable du monde.

On y suit l’histoire d’un homme se retrouvant jugé et condamné par la société pour un crime qu’il ne s’explique pas lui-même. Le personnage principal est un homme ordinaire, dans une vie ordinaire, qui se laisse simplement aller à vivre, au travers de ses sensations physiques.

Camus est mû par une triple intention :

  • faire le portrait d’un personnage énigmatique par sa simplicité
  • montrer comment les événements d’une vie peuvent dépasser la compréhension des autres
  • dresser un tableau pessimiste de notre condition d’humains

C’est l’un des romans français le plus lu au monde : traduit dans soixante-huit langues, il profite encore aujourd’hui d’une forte notoriété.

Qui est l'auteur de l'étranger ?
Portrait d'Albert Camus. Source : Revue des Deux Mondes

Résumé du roman

Première partie

Meursault, le narrateur, apprend la mort de sa mère, par un télégramme envoyé de l’asile de Marengo dans lequel elle vivait depuis trois ans et qui se situe à quatre-vingts kilomètres d’Alger, la capitale de l’Algérie.

Meursault, jeune et modeste employé de bureau à Alger, demande et obtient un congé de quarante huit-heures. Il se rend d’abord chez Céleste, le restaurant dans lequel il déjeune tous les jours.

Vers quatorze heures, il prend l’autobus qui se rend à Marengo. Assommé par la chaleur, il dort pendant tout le voyage ou presque. Une fois au village, il doit se rendre à pied à l’asile, qui se trouve à deux kilomètres.

Le directeur de l’asile lui apprend que sa mère n’y séjournait malheureusement pas. Il lui annonce aussi que l’enterrement religieux doit se tenir le lendemain matin. Il se retrouve finalement dans une salle blanchie à la chaux où a été posé le corps de mère. Il refuse cependant de voir le corps de la défunte.

Le concierge se met à lui parler : il lui raconte sa vie et lui propose un dîner au réfectoire mais Meursault décline. Il ne prendra qu’un café au lait avec lui.

Se tient alors la veillée, qui est interminable : les amis de sa mère s’installent autour du cercueil, en faisant des bruits étranges avec leurs bouches sans dent. Meursault ne peut s’empêcher de penser que ces vieillards sont ici pour le juger.

Lorsque le jour se lève enfin, Meursault est fasciné par la beauté du matin. Il se douche rapidement, prend un nouveau café au lait avec le concierge et se rend chez le directeur pour diverses formalités.

Le cortège funèbre se met en route vers l’église, qui se trouve à trois quarts d’heure à pied. Il fait très chaud et un vieillard suit péniblement le rythme de la marche : il s’agit de Tomas Pérez, que les autres pensionnaires désignaient comme le « fiancé » de sa mère.

L’enterrement se déroule comme un songe pour Meursault : il y a l’église, le cimetière, l’évanouissement du vieux Pérez, l’attente encore puis sa joie finale lorsque l’autobus le ramène à Alger. Il n’aura pas pleuré une seule fois, pas même pour simuler un chagrin qu’il ne ressentait pas.

Le samedi d’après, lorsqu’il se réveille, il tente de comprendre l’agacement de son patron. En tout, il se sera absenté quatre jours : deux jours de congés pour l’enterrement, deux jours de week-end.

Ne sachant que faire, il décide d’aller se baigner au port. C’est là qu’il rencontre Marie Cardona, une ancienne secrétaire de son bureau pour qui il avait eu, à l’époque, du désir. Ils s’amusent ensemble dans l’eau, leurs corps se touchent puis, finalement, ils s’endorment tous les deux sur une bouée.

Lorsque Meursault se rhabille, Marie découvre par la cravate noire de celui-ci qu’il est en deuil. Elle est très surprise d’apprendre que sa mère est morte la veille.

Le soir, ils vont voir un film de Fernandel. Au cours de la séance, Meursault caresse les seins de Marie et l’embrasse. Elle passe finalement la nuit chez lui mais, au petit matin, elle n’est plus là lorsque lui se réveille.

Meursault reste toute la matinée au lit en fumant des cigarettes. Il se fait des œufs au plat qu’il mange à même la casserole. Encore désoeuvré, il passe l’après-midi sur son balcon, observant les passants. Le soir arrivé, il se dit :

que c'était toujours un dimanche de tiré, que maman était maintenant enterrée, que j'allais reprendre mon travail et que, somme toute, il n'y avait rien de changé.

Le lundi matin, il retourne donc au bureau. Le midi, il se rend comme d’habitude chez Céleste avec Emmanuel, un collègue. Après cela, une sieste chez lui, puis de retour au bureau pour l’après-midi.

Lorsqu’il retourne chez lui, le soir, il rencontre le vieux Salamano, son voisin de pallier, qui sort son chien en l’insultant – scène à laquelle il assiste depuis huit ans.

Il tombe ensuite sur son autre voisin de pallier, Raymond Sintès, qui l’invite à manger. Il lui raconte une rixe qui explique le pansement qu’il a la main : son adversaire était le frère d’une femme qu’il « entretient » et qu’il veut punir parce qu’elle l’a, en quelque manière, trompée. Il veut lui écrire une lettre, pour la faire revenir et pour pouvoir l’humilier par la suite.

Il demande à Meursault d’écrire cette lettre, ce qu’il fait. Raymond le remercie chaleureusement et lui assure : « Maintenant, tu es un vrai copain. »

Une nouvelle semaine insipide et laborieuse s’achève. Le samedi, il retrouve Marie pour se rendre en bus à une plage à quelques kilomètres de la capitale. Ils s’amusent ensemble dans l’eau et retournent, le soir, chez Meursault.

Le dimanche matin, Marie est toujours là. Elle lui demande s’il l’aime, et il répond « que cela ne voulait rien dire », mais qu’il lui « semblait que non ». Sa compagne paraît alors un peu triste, mais sa bonne humeur revient vite.

Ils entendent alors des bruits chez Raymond : son voisin frappe une femme en l’injuriant. Meursault et Marie sortent sur le pallier mais un agent de police met fin à la dispute. La fille accuse Raymond d’être un souteneur et celui-ci est convoqué au commissariat.

Dans l’après-midi, une fois Marie partie, Raymond sonne chez Meursault. Il est heureux de sa vengeance et lui demande de venir témoigner, ce qu’il accepte. Ils sortent se promener ensemble, et le narrateur passe un bon moment.

Lorsqu’ils reviennent dans l’immeuble, ils trouvent Salamano sans son chien. Le maître, affolé, apprend aux deux hommes comment l’animal s’est sauvé. Alors ils le rassurent, lui promettant qu’il reviendrait.

Le lundi, alors que Meursault se trouve à son bureau, Raymond l’appelle pour l’inviter avec Marie à passer le dimanche suivant chez un ami, dans un cabanon de bord de mer, près d’Alger. Il lui apprend également qu’un groupe d’Arabes, dont le frère de son ancienne maîtresse, l’a suivi toute la journée.

Dans cette même journée, son patron lui propose de l’envoyer à Paris : il envisage en effet d’y ouvrir une agence. Devant le peu d’enthousiasme montré par son employé, il lui reproche son indifférence et son manque d’ambition.

Le soir même, Marie vient chercher Meursault et lui demande s’il veut se marier avec elle ; il répond que cela n’a aucune importance mais que, si elle le désire, il le veut. Sur quoi Marie s’en va car elle a « à faire ».

En rentrant chez lui, après un dîner chez Céleste, Meursault tombe sur Salamano, qui lui apprend que son chien est vraiment parti. Salamano disserte alors sur sa jeunesse, son ambition d’avant, sa femme décédée. Puis il évoque la mère de Meursault pour lui faire part des ragots qui ont suivi dans le quartier lorsqu’il décidât de la mettre à l’asile. Mais lui, Salamano, qui connaissait bien Meursault, savait bien qu’il aimait beaucoup sa mère.

Dimanche, Marie appelle Meursault, ce qui le réveille. Ils frappent tous les deux à la porte de Raymond. La veille, Meursault est allé au commissariat pour témoigner que la fille avait « manqué » à Raymond. Marie est heureuse de se retrouver au bord de mer avec Meursault.

Avant de monter dans le bus, Raymond aperçoit le groupe d’Arabes qui les regardent. Ils prennent le bus et se retrouve chez Masson, l’ami de Raymond.

Meursault et Marie partent se baigner tous les deux puis s’allongent au soleil. Le déjeuner, en compagnie de Raymond, Masson et sa femme, est arrosé ; la chaleur est déjà insoutenable.

Pendant que Marie aide Mme Masson à faire la vaisselle, les trois hommes partent se promener sur la plage. Ils aperçoivent alors deux Arabes et Raymond, reconnaissant son ennemi, dit : « C’est lui. » Raymond le frappe, Masson s’occupe de l’autre, Meursault ne se mêle de rien. Raymond finit blessé par un coup de poignard, mais sans gravité.

Tandis que Raymond est parti chez un médecin pour se faire soigner, Meursault est resté avec les femmes. A son retour, vers une heure et demie, Raymond et Meursault retournent sur la plage. Les deux Arabes sont encore là, près d’une source. Raymond provoque directement son adversaire, ayant préalablement remis à Meursault son revolver, sur l’insistance de celui-ci. Les deux Arabes finissent par s’en aller.

A peine de retour au cabanon, Meursault ressent le besoin de retourner sur la plage. La chaleur est toujours insoutenable. Près de la source, où se trouve de l’ombre, l’Arabe de Raymond est revenu.

Il serre le pistolet de Raymond dans sa poche et envisage de faire demi-tour. Mais la plage est « vibrante de soleil » et l’en décourage. L’Arabe tire son couteau, la lumière se réverbère sur la lame ; les yeux brûlants, aveuglés de sueur, la main de Meursault se crispe sur le revolver et le coup part.

C'est là, dans le bruit à la fois sec et assourdissant, que tout a commencé. J'ai secoué la sueur et le soleil. J'ai compris que j'avais détruit l'équilibre du jour, le silence exceptionnel d'une plage où j'avais été heureux. Alors, j'ai tiré encore quatre fois sur un corps inerte où les balles s'enfonçaient sans qu'il y parût. Et c'était comme quatre coups brefs que je frappais sur la porte du malheur.

Où se déroule l'intrigue de L'Etranger ?
La Grande Poste d'Alger

Deuxième partie

Meursault est alors arrêté. Il doit répondre aux policiers au commissariat, puis au juge d’instruction.

Il ne prend pas d’avocat car il trouve son affaire « très simple » : on lui en désigne un d’office. Celui-ci l’interroge d’emblée sur sa mère et ses sentiments à son égard. Il est alors gêné par ses propos naïfs et sincère.

Le juge d’instruction lui demande aussi, au cours d’un nouvel interrogatoire, s’il aimait sa mère. Il voudrait également comprendre pourquoi Meursault a attendu entre le premier et les autres coups de feu. L’accusé ne témoigne d’aucun regret et, surtout, reste silencieux.

L’instruction va durer onze mois et, maintenant que l’avocat y assiste, Meursault a l’impression d’être mis à l’écart.

Il se retrouve rapidement tout seul dans une cellule, depuis laquelle il peut voir la mer. Marie lui rend visite au parloir, mais ses paroles sont recouvertes par celles des autres prisonniers. Il ne lui répond que par des phrases courtes, mais il voudrait, au fond de lui, la prendre dans ses bras. Elle ne lui enverra qu’une seule lettre, en tout et pour tout.

Si, d’abord, la mer lui manque, comme les cigarettes et les femmes, il s’habitue vite aux privations et ne se trouve « pas trop malheureux ». Pour tromper l’ennui, il dort, il lit, il se souvient. Il trouve un morceau de papier journal sur un vieux matelas et lit, relit, le fait divers qui y est conté.

Le procès aux assises se tient en juin. Le matin même, Meursault confie à un gendarme l’intérêt qu’il a à assister à un procès. La salle est bondée : il y a les jurés, les journalistes, la cour, les témoins, les spectateurs. Il se sent tout de suite de trop.

La séance commence par des questions administratives, puis on énonce les faits.

Le Président interroge Meursault sur sa mère et sur le meurtre de l’Arabe. Puis les témoins défilent : le directeur de l’asile, le concierge, Thomas Perez. Alors le tribunal apprend que Meursault n’a pas pleuré à l’enterrement de sa mère, qu’il n’a pas voulu voir son corps, qu’il a fumé dans la morgue. La salle se trouve choquée, le procureur, lui, est satisfait.

Céleste arrive alors à la barre, pour seulement qualifier de « malheur » ce qui arrive à Meursault. Marie, à son tour, sous la pression du procureur, doit avouer que sa « liaison irrégulière » avec l’accusé a commencé le lendemain de l’enterrement, et qu’ils sont allés voir une comédie avec Fernandel. Puis elle éclate en sanglots car on « la forçait à dire le contraire de ce qu’elle pensait ».

C’est au tour de Masson et de Salamano. A cette suite, l’avocat général révèle que Raymond est un « souteneur » et que Meursault a rédigé la lettre à l’origine du drame, et qu’il a même témoigné en faveur de Raymond. C’est là, pour lui, la preuve que le crime de Meursault est un complot savamment orchestré :

J'accuse cet homme d'avoir enterré sa mère avec un cœur de criminel.

Meursault, de retour dans sa cellule, se dit qu’il assiste à ce procès comme s’il y était étranger. Son avis n’est jamais sollicité. Il réfléchit alors sur quelques points : le procureur l’accuse de préméditation sur la base de son « insensibilité », notamment prouvée lors de l’enterrement de sa mère.

Le lendemain, le procureur va même jusqu’à demander la tête de l’accusé, qui est coupable de « parricide » à l’endroit de sa mère. Le président demande alors s’il souhaite apporter un commentaire. Il indique alors qu’il ne voulait pas tuer l’Arabe et qu’il l’a simplement tué à cause du soleil. Au rire qui éclate dans la salle, Meursault prend conscience du ridicule de la situation.

L’avocat plaide enfin les circonstances atténuantes. Il met en avant les qualités morales de Meursault. Lui ne l’écoute plus : il repense à sa vie et éprouve une grande lassitude.

Pendant les délibérations du jury, l’avocat pense que le verdict sera favorable. Après une longue attente, le président lit la condamnation : Meursault aura « la tête tranchée sur une place publique au nom du peuple français ».

Meursault refuse de voir l’aumônier. Il pense à la mort qui l’attend, aux moyens d’y échapper. Il pense à son père qui avait assisté à une exécution. Il pense à tous les éléments de la mise en scène, avec la guillotine, l’aube, etc.

Sachant que les bourreaux arrivent à l’aube, il vit chaque comme un jour de sursis supplémentaire. Il espère même une grâce et cela le remplit d’une joie insensée.

Lorsque, finalement, l’aumônier pénètre dans sa cellule, il pense à Marie, qui ne lui a écrit qu’une seule fois. Mais lorsque la conversation s’engage, Meursault est révolté par la douceur et l’espoir des paroles du religieux. Et lorsque celui-ci l’invite à se repentir, le condamné à mort lui oppose qu’il ne sait même pas ce qu’est le péché.

Lorsque l’aumônier, en partant, lui promet de prier pour lui, Meursault se précipite vers lui, l’attrape et l’insulte. Une fois l’autre parti, il retrouve son calme, et se laisse apaiser par la nuit :

Devant cette nuit chargée de signes et d’étoiles, je m’ouvrais pour la première fois à la tendre indifférence du monde. De l’éprouver si pareil à moi, si fraternel enfin, j’ai senti que j’avais été heureux, et que je l’étais encore. Pour que tout soit consommé, pour que je me sente moins seul, il me restait à souhaiter qu’il y ait beaucoup de spectateurs le jour de mon exécution et qu’ils m’accueillent avec des cris de haine.

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Pistes d’analyse

Structure du roman

L’Etranger est composé de deux parties, qui forment un diptyque à la composition presque semblable au niveau formel.

La première partie est faite de six chapitres et retrace la vie quotidienne de Meursault, depuis la mort de sa mère jusqu’au meurtre de l’Arabe.

La seconde partie se compose de cinq chapitres et se déploie comme un parallèle de la première : les événements de la première partie, durant le procès, sont revus et commentés par les témoins, jusqu’à l’annonce de la condamnation à mort.

Les deux parties sont ainsi soudées par le même thème : l’omniprésence de la mort. Il y a en effet :

  • la mort de la mère
  • le meurtre de l’Arabe
  • la condamnation à mort de Meursault

Ainsi, la vie humaine se déroule systématiquement de concert avec la pensée obsédante de la mort, qui termine toute existence.

Comment voir la condamnation à mort de Meursault ? Par la métaphore : sa cellule est une image de la condamnation humaine ; sa condamnation, un rappel que tout être humain est, dès sa naissance au monde, condamné à mort.

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Le portrait de Meursault : un personnage différent

« Meursault » fait penser au couplage de meurtre (avec « meur ») et de soleil (avec « sault »). Le nom du personnage principal renvoie ainsi directement aux moteurs de l’histoire. C’est en effet par le simple effet sensible du soleil sur son esprit et sa peau qu’il en viendra à tuer l’Arabe. C’est aussi ces raisons trop « simplistes » pour une société qui n’a pas les mêmes critères d’appréciation qu’il se retrouvera condamné.

Alors, qu’en est-il de son insensibilité ?

Son absence de toute émotion apparente peut tout à fait être envisagée comme une forme de pudeur. Le fait qu’il nomme sa mère « Maman » et non « Ma mère » traduit déjà sa sensibilité. De même, lorsqu’il entend sangloter Salamano pour son chien, il dira :

Et au bizarre petit bruit qui a traversé la cloison, j’ai compris qu’il pleurait. Je ne sais pas pourquoi j’ai pensé à maman.

Mais il est vrai que certaines des remarques du narrateur peuvent étonner le lecteur. Cela crée un effet de frustration : durant la première partie, le lecteur ne peut pas totalement aimer ce narrateur qui semble si étrange ; mais, dans la seconde partie, toutes les accusations proférées durant le procès lui semblent trop lourdes, trop exagérées. De sorte que le lecteur n'est jamais vraiment satisfait.

De fait, Meursault apprécie avant tout la joie sensible, physique, comme en témoigne les longs bains de mer avec Marie, ou les plaisirs de l’amour avec cette même Marie. Il ressent les choses physiquement avant que de tenter de les comprendre.

Sa sensibilité au soleil ainsi que les mentions de sa fatigue, qui sont fréquentes dans le roman, plaident de la même manière pour un être d’instinct et de nature. Il dira ainsi à son avocat, au début de la deuxième partie :

Cependant, je lui ai expliqué que j’avais une nature telle que mes besoins physiques dérangeaient souvent mes sentiments.

On peut également relever l’attitude machinale du personnage, qui explique beaucoup d’événements par la force des habitudes. L’enterrement de sa mère provoque un dérèglement dans son train habituel de vie et il témoigne de son plaisir à retrouver une semaine normale de travail, qui commence par un lundi et se termine par un vendredi.

Comment expliquer l'attitude de Meursault dans le roman L'étranger ?
L’Heure du bain, Joachim Sorolla, 1904

Enfin, on peut souligner l’absence, dans le roman, de toute description matérielle : le lecteur ne saura jamais à quoi ressemble l’appartement de Marceau, pas plus que son bureau. Cela engage à croire que le narrateur lui-même n’a que faire de ses possessions et de la richesse matérielle.

Dans la première partie du récit, Meursault nous est donc présenté comme un personnage différent de la plupart de ses semblables. Meursault manifeste une grande indifférence vis-à-vis de ce qui est important, au contraire, pour les autres. Un des exemples les plus parlants, c’est lorsqu’il refuse l’augmentation que lui propose son employeur (chapitre V de la partie I) :

J’ai dit que oui mais que dans le fond cela m’était égal. (…) J’ai répondu qu’on ne changeait jamais de vie, qu’en tout cas, toutes se valaient et que la mienne ici ne me déplaisait pas du tout.

Le procès : les autres condamnant Meursault pour son étrangeté

Meursault, tout au long de son procès, s’étonne de ce qu’il voit. Il s’en dissocie et y assiste comme un simple spectateur. Néanmoins, dans la deuxième partie, on trouve une présence accrue de l’auteur (Albert Camus), qui vient commenter l’institution judiciaire, dans son ambition de jugement.

On trouve quatre représentants emblématiques de la société qui sont pris pour cible :

  • le juge d’instruction, avec le chapitre 1 de la deuxième partie
  • l’avocat, avec le chapitre 2 de la deuxième partie
  • le procureur, avec le chapitre 4 de la deuxième partie
  • le prêtre, avec le chapitre 5 de la deuxième partie

Le juge d’instruction

Il témoigne d’une bonne volonté et met Meursault en Confiance. Il tente de s’intéresser à la personnalité de Meursault (il dira : « Ce qui m’intéresse, c’est vous. »).

Mais il cherche à savoir surtout pourquoi Meursault tira quatre coups de feu supplémentaire. N’obtenant pas de réponse, il répondra par Dieu et demandera à Meursault s’il est croyant. Devant sa réponse négative, il conclura que Meursault ne mérite pas d’attention et qu’il est coupable de quelque chose, au moins.

Meursault est bien étranger à lui : par sa personnalité, d’abord, puisqu’il ne confie pas ses impressions, et par ses valeurs (il ne croit pas en Dieu).

L’avocat

Son avocat utilise d’emblée le pronom personnel « je » pour parler de Meursault : cela confère à l’accusé, au personnage principal du roman, un rôle passif.

L’avocat ne cherchera pas à comprendre qui est Meursault : il ne veut que comprendre, dans son zèle professionnel mais mal à-propos, les éléments à charge du dossier. Il lui demande ainsi d’éviter de dire à la cour l’« indifférence » dont parle Meursault.

Il sortira en colère de leur premier entretien, furieux de ne pas avoir convaincu ce client si différent.

Le procureur

Le procureur constatera lui aussi l’étrangeté de Meursault et ne tentera pas de la comprendre.

Simplement, il interprète les faits selon les préjugés de sa fonction et il le condamne sans équivoque :

Il a déclaré que je n’avais rien à faire dans une société dont je méconnaissais les règles les plus essentielles.

Le prêtre

C’est par le prêtre que Meursault prend conscience de son étrangeté radicale au monde.

Meursault refuse de voir ce que le prêtre l’incite à voir au-delà de la simple réalité concrète. Ensuite, Meursault refuse le baiser du prêtre.

C’est dire que Meursault ne fait pas partie de ceux qui s’aveuglent : il refuse la croyance religieuse comme refuge pour se rassurer vis-à-vis de la mort qui vient. Sa seule certitude, c’est celle que la vie doit se terminer un jour :

J’étais sûr de moi, sûr de tout, plus sûr que lui, sûr de ma vie et de cette mort qui allait venir. Oui, je n’avais que cela. Mais, du moins, je tenais cette vérité autant qu’elle me tenait. J’avais eu raison, j’avais encore raison, j’avais toujours raison. (…) C’était comme si j’avais attendu pendant tout le temps cette minute et cette petite aube où je serais justifié. Rien, rien n’avait d’importance et je savais bien pourquoi. Lui aussi savait pourquoi. (…) Tout le monde était privilégié Il n’y avait que des privilégiés. Les autres aussi, on les condamnerait un jour. Lui aussi, on le condamnerait. Qu’importait si, accusé de meurtre, il était exécuté pour n’avoir pas pleuré à l’enterrement de sa mère ? (…)

Meursault est bien cet étranger qui délivre le message à ses semblables : qu’on le haïsse parce qu’on rejette à travers lui notre condition humaine absurde, projetée vers la mort.

La symbolique du meurtre de l’Arabe

Le hasard de la rencontre

Dès le matin du jour du meurtre, Meursault exprime sa fatigue. Ensuite de quoi, il se baigne à trois reprises, augmentant encore sa fatigue. Puis il mange un lourd repas, et boit du vin. Viendront ensuite la rixe, la blessure de Raymond et la dispute des deux femmes. Pour une âme aussi sensible que celle de Meursault, cela explique au moins qu’il soit dans un état anormal au moment du drame.

Lorsqu’il se retrouve seul sur la plage, à la recherche de fraîcheur et de silence, il doit plutôt affronter la chaleur du soleil, proche de l’insolation. La présence de l’Arabe achève de perturber son esprit et la perspective de faire demi-tour n’est pas envisageable pour son esprit fatigué.

Mais on pourra noter à quel point le style de la scène du meurtre dénote du reste du récit. Tandis que la narration se fait à partir de phrases courtes et de formulations simples, la rencontre avec l’Arabe se déroule avec une forme de lyrisme qui surprend.

Camus a voulu se rapprocher ainsi d’un style plus classique qui renvoie à la tragédie, pour souligner le caractère inéluctable du drame :

  • hasard de la rencontre qui évoque le destin des tragédies
  • toute-puissance des éléments (ciel, mer, soleil)
  • dépassement de la limite, qui évoque l’hubris (= démesure) de la tragédie grecques (le narrateur dit : « Mais j’ai fait un pas, un seul pas en avant. »

Cela renvoie une nouvelle fois à la condition misérable de l’être humain, incapable de mesurer la conséquence de ses actes.

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La dimension historique

De quoi le meurtre de l'Arabe est-il le symbole dans le roman L'Etranger ?
Un billet de l'Empire colonial français

On peut enfin voir dans le meurtre de l’Arabe une dimension historique : l’Algérie est en effet une colonie française, et les Arabes d’Algérie subissent, d’une certaine manière, la présence oppressante du colon.

Ainsi, lorsque Meursault arrive, l’Arabe est déjà installé sous la fraîcheur de l’ombre. Meursault, lui, fantasme de cette fraîcheur. Il y a donc un conflit entre deux personnes qui rêvent du même espace – tout comme la France a rêvé de l’Algérie au moment de la colonisation.

Le nouvel arrivant tue, en toute responsabilité, le premier occupant, pourtant passif et innocent, comme le colonisateur a tué le colonisé. Ainsi, l’Arabe était couché et muni d’un couteau (passivité et tradition) ; le Français était débout et armé d’un revolver (domination et modernité).

La description de la scène dessine la figure contrastée de l’inégalité même : l’un est allongé (passif) quand l’autre est debout (dominateur) ; celui-là est armé d’un couteau (tradition) quand celui-ci tient un révolver (modernité).

Dans une deuxième phase, toutefois, Meursault, le nouvel arrivant, par son geste même, a conscience d’ « avoir détruit l’équilibre du jour », c’est-à-dire d’avoir dépassé une limite, ce qui pourrait traduire le sentiment de mauvaise conscience du colonisateur.

Une troisième phase se joue lors du déroulement du procès de Meursault qui sera condamné par la justice comme l’est le colonisateur au regard de l’Histoire.

On pourra relever enfin que Meursault, à son procès, ne s’excuse pas – comme le colon ne s’est pas excusé ; mais il a d’emblée, dès le premier coup de feu, le sentiment d’une erreur, d’une faute, comme celle d’avoir troublé l’équilibre de la Nature pour l’éternité...

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Nathan

Ancien étudiant de classe préparatoire b/l (que je recommande à tous les élèves avides de savoir, qui nous lisent ici) et passionné par la littérature, me voilà maintenant auto-entrepreneur pour mêler des activités professionnelles concrètes au sein du monde de l'entreprise, et étudiant en Master de Littératures Comparées pour garder les pieds dans le rêve des mots.